LA POSTE A L’ORIGINE D’AOUSTE SUR SYE

La Poste à l’origine d’Aouste sur Sye






Le village d’Aouste sur Sye semble construit sur un axe est-ouest, en parallèle à la Drôme. Or, historiquement, c’est un axe nord-sud qui permit le développement de ce site, un gué sur la Drôme est à l’origine de l’expansion de celui-ci.

Vers 500 avant J.-C., la Route de l’Étain est créée par les Grecs pour l’acheminement de ce métal entre la région de Nantes et la Méditerranée. La carte des « Voies antiques d’Altonum » indique que la principale voie de l’étain passait par le Pas de Lauzens et l’emplacement d’Aouste, avant de continuer vers Pizançon par les Arras.

Sur cet axe antérieur nord-sud, l’administration impériale d’Auguste renforce un « bourg de contact » gallo romain en créant un relais de poste (Mansio Augusta) autour duquel s’agglomère une bourgade (Augusta Vocontiorum). Cette liaison permet de renforcer les échanges économiques administratifs et militaires avec le sud.L’agglomération d’Aouste est une étape sur la « Voie des Alpes, itinéraire Valence – Montgenèvre » indiquée sur tous les itinéraires romains dont l’Itinéraire de Bordeaux à Jérusalem en 333 et la « table de Peutinger » et la « Cosmographie de Ravenne » .

Avec la chute de l’Empire Romain et après les invasions barbares des Ve et VIe siècles la Poste n’est plus assurée.

Le Moyen-Âge connaît plusieurs services postaux, celui des Grands du royaume, celui des Corps organisés comme les villes, les communautés religieuses ou les universités. Le souverain avait également ses propres coursiers, on les appelait les Chevaucheurs de l’écurie du Roi, ils ne transportaient que la  correspondance du monarque. Les moines attachés au service des abbayes utilisaient les services d’un porte-rouleau. Celui-ci transportait d’abbaye en abbaye un parchemin qui s’allongeait au cours du voyage. Les « Rotula » annonçaient les évènements des communautés. Certains rouleaux atteignaient 16 m de longueur.

Depuis le XIIIe siècle, les universités avaient un service de messagerie utilisé par les étudiants et leurs familles. On distinguait les grands messagers qui subvenaient aux besoins des étudiants, des petits messagers qui eux se déplaçaient et apportaient des nouvelles aux familles. Ces petits messagers furent autorisés à se charger de la correspondance des particuliers.

 Il faut attendre Louis XI pour assister, vers 1477, à la réapparition d’une infrastructure de relais de chevaux, ces établissements ne sont créés que pour les seuls besoins du souverain. C’est le point de départ de la poste aux chevaux. Les premiers transports publics apparaissent dès le XVIe siècle.

En 1576, le roi Henri III institue des messageries royales qui concurrencent alors les messageries universitaires. A la fin du XVIe siècle, est créée la poste  aux lettres.

C’est au début du XVIIe siècle que date l’origine de l’administration des Postes en France, avec la création de la « poste aux lettres », dirigée par le surintendant général des postes. À l’époque, le port était payé par le destinataire. Le service a été organisé par l’État pour sa communication interne et la transmission des ordres, des rapports, entre les différents échelons de son administration.

Dans les comptes consulaires d’Aouste, on relève que le consul a payé 5 sols en 1625 à un messager qui apportait une lettre envoyée de Grenoble ; un messager express recevra 4 sols en 1630. A la veille de la Révolution le port d’une lettre varie de 10 à 15 sols.

En 1672, l’Administration des postes est confiée à une Ferme générale, qui rachète alors le  droit des messageries. Cette institution, qui est administrée par des financiers (les Fermiers des postes) à partir de 1672, enlève aux messageries le droit de transporter des lettres. Contre paiement d’un bail, les Fermiers des postes encaissent à leur profit  les taxes des lettres. Ces financiers réalisent de copieux bénéfices jusqu’à la Révolution, époque à laquelle les postes passent directement sous le contrôle de l’Etat. C’est le temps des malles-poste et d’une formidable accélération de l’acheminement, toujours au rythme du galop, un privilège exclusif de la Poste royale.

En 1879 deux administrations, celle des postes et celle du télégraphe, sont fusionnées pour former l’administration des postes et télégraphes. Les Postes, Télégraphes et Téléphones (PTT) sont rattachées au ministère des Postes et Télécommunications.

Il faudra attendre la fin du XIXe siècle pour que Aouste soit dotée d’une poste.

Sur l’emplacement de l’actuelle poste, on trouvait le jardin du curé avant que l’on y édifie en 1821 une maison appartenant à Mr Beylier Pierre Etienne maire de Crest, ce bâtiment devient en 1863 une mairie-école, bâtiment agrandi en 1897. La mairie est transférée en 1913 dans un nouveau bâtiment, la Poste fermera en 2010.

La première demande de création d’un bureau de poste à Aouste date de 1860, elle est longuement motivée par une population de 1200 âmes et une « industrie considérable, on y compte deux papeteries, une importante fabrique de soie, deux ateliers assez considérables de foulons de draps, des moulins à farines, pressoirs a huile, des fours a chaux, des chapeliers…. et un assez grand nombre des ouvriers … »

 

Place de la Poste en 1903

Plan cadastral de 1811  ( la croix rouge signale l’emplacement actuel de la Poste)

Plan cadastral actuel

 


Histoire postale d’Aouste


Extrait de la délibération du 11 mai 1823. (Archives Communales)

« Motifs qui ont déterminé le conseil municipal à admettre en reprises et par suite en dépense dans le présent compte les 4 articles de dépense rejetés par Monsieur le sous-préfet dans les comptes au percepteur de 1821.

1er article : quant aux 12 francs de messager ou piéton de la commune, le conseil observe que cette dépense fut proposée par Monsieur le maire et le conseil municipal au budget de 1821, que sur proposition de Monsieur le sous-préfet, Monsieur le préfet alloua cette dépense en l’élevant à 32 francs.

Le conseil ajoute « que de tout temps il y a eu un messager ou piéton qui se rend tous les jours d’Aouste au bureau de la poste à Crest pour y porter et retirer les paquets adressés à la mairie, qu’il a été constamment alloué à ce messager encore on lui paye aujourd’hui pour ces services d’une nécessité absolue une modique somme de 12 francs qui a toujours été allouée séparément dans les divers budgets. Depuis 1817 et les années antérieures, que sur ces mêmes budgets on y voit figurer aussi une somme de 20 francs proposée par Monsieur le sous-préfet et allouée par Monsieur le préfet sous la dénomination de dépense commune à plusieurs municipalités. Que cette dernière dépense a cessée d’être portée sous cette dénomination à partir du budget de 1818 ou elle fut cumulée au 12 francs du piéton de la mairie et portée dans le budget et ceux postérieurs à 32 francs par monsieur le préfet sur la seule préposition de Monsieur le sous-préfet que pendant les années1818, 1819, 1820. Monsieur a délivré un mandat d’une somme de 20 francs pour le piéton de la mairie que par erreur sans doute le mandat de 1821, a été de 32 francs en sorte que cette erreur a pu faire croire à son successeur que les 12 francs pour le piéton de la mairie n’étaient pas portés au budget de 1821. Le conseil municipal quant à cette dépense pour laquelle Monsieur le sous-préfet a délivré au mandat sur le percepteur de la commune au profit du caissier de l’arrondissement n’a refaire aux observations qu’il a fait annuler la précédente version et surtout les années 1821et 1822. Mais il observe que 12 francs demandés en dépense pour le percepteur dans son compte de 1821 est rejeté par Monsieur le sous-préfet doivent être alloués comme ayant un objet de nécessité absolue et indispensable pour l’administration de la mairie comme ayant été porté à tout temps dans le budget ».

Cette délibération confirme l’existence d’un messager entre la commune d’Aouste et le bureau de direction de Crest.

 

Facteur rural

 


Demande de la création du bureau de poste à Aouste

 

Archives communales Aouste (page 131)

« Le vingt cinq mai mille huit cent soixante dans la maison commune du bourg d’Aouste, canton de Crest nord, arrondissement de Die.

Le conseil municipal de la dite commune réuni en session ordinaire de mai, sur la convocation et sous la présidence de Monsieur Gresse en sa qualité de maire ; présents messieurs Tavan Antoine, Alexandre Leygat, Edouard Athenor, Tardieu, Forget, Filliat, Davin, Charnier, Terrail François, Rolland, Brun André, conseillers,

A délibéré ainsi qu’il suit et à l’unanimité sur l’urgente nécessité d’obtenir pour la commune d’Aouste la création dans l’enceinte du bourg d’un bureau de distribution des postes.

Le bourg d’Aouste est distant de la ville de Crest de trois kilomètres au plus.

La population de la commune s’élève à 1200 âmes environ, le dernier recensement l’a fixé à 1189.

Son industrie est considérable, on y compte deux papeteries, une importante fabrique de soie, deux ateliers assez considérables de foulons à draps, des moulins à farines, pressoirs à huile récemment rétablis à neuf sur les meilleurs modèles fonctionnant tant pour les besoins des habitants que pour un commerce d’autant plus étendu que c’est l’unique usine occupant des ouvriers en assez grand nombre dont la plupart sont étrangers. Les correspondances des chefs d’atelier et de leurs employés ou ouvriers sont forcément très fréquentes et du plus grand intérêt pour tous.

Il y a en outre à Aouste des fours à chaux, des chapeliers, des marchands de bois, des marchands de graines, des bourreliers, des charrons, des cafetiers et des cabaretiers, des cordonniers, des bouchers, des marchands de draperie, des nouveautés, des marchands de mode, des perruquiers, des menuisiers, des maréchaux-ferrant, un ferblantier, un horloger, un notaire enfin il y a plus de quatre vingt patentés dans la commune.

Le service de la poste aux lettres est fait par un facteur rural qui part de Crest chaque jour vers huit heures du matin et qui dessert Aouste et Piégros. Cependant à sept heures du matin le courrier du midi arrive à Crest et les dépêches traversent le bourg d’Aouste à sept heures et demie tandis que le facteur ne peut faire sa distribution qu’entre neuf et dix heures.

L’important courrier qui relie nos contrées à la capitale au chef-lieu du département et aux grands centres avec lesquels l’industrie d’Aouste, l’administration et la population entière ont des relations incessantes et si essentielles, arrive à Crest à midi et n’est distribué que le lendemain entre neuf et dix heures du matin ; ainsi ce courrier du nord est distribué à Saillans, Die à Luc et dans le département des Hautes Alpes, vingt heures et dix heures pour ce dernier département avant de parvenir à Aouste.

Le courrier de l’est reste aussi à Crest de neuf heures du soir à neuf heures du matin du lendemain.

Démontre à l’administration supérieure les graves inconvénients qui résultent de cet état de choses pour l’industrie, pour le commerce, pour l’administration, pour la population entière de la commune d’Aouste ; c’est appeler toute sa juste sollicitude pour le redressement des tords graves que sa continuation d’un pareil état ferait peser sur cette commune et plein de confiance le conseil municipal a l’autorité a l’effet d’obtenir la création d’un bureau de distribution de poste dans le bourg d’Aouste, il sollicite à cet effet l’éclairé et puissant appui de Monsieur le préfet, de Monsieur le sous-préfet, du conseil d’arrondissement et du conseil général du département ; Monsieur le maire est chargé de faire parvenir des extraits de la présente délibération à Monsieur le préfet, Monsieur le sous-préfet ainsi délibéré et arrêté par les membres du conseil municipal qui ont signé avec Monsieur le maire après lecture faite ».

En marge : « adressé le 14 juillet 1860 à Monsieur le préfet et Monsieur le sous-préfet, un extrait de la présente délibération avec prières d’être favorable à la demande ».

 

Réponse

(Archives Départementales 6P2-1)

 Conseil général – Session de 1860

« La commune d’Aouste, qui est traversée deux fois le jour par les courriers de montée et de descente de Die à Valence et de Die à Loriol, sollicite la création du bureau de distribution .

Le conseil d’arrondissement en appuyant cette demande ajoute que si ce bureau de distribution d’Aouste ne peut être créé immédiatement, un facteur boîtier demeurant à Aouste et Piégros remplirait à peu près le même but presque sans augmentation de dépense : je vous propose de délibérer dans le même sens : Aouste mérite la faveur qu’il sollicite par son importance et je crois qu’on ne lui refusera pas l’un ou l’autre des avantages qu’il sollicite. ».

Ces observations amènent à :

      • Le 1er août 1861 Aouste se voit attribuer un facteur boîtier.

      • Le 1er janvier 1870 création du bureau de recette.

      • Le 16 juin 1886 ouverture de la télégraphie privée. (AD 6P2-1).

  Le 1er Janvier 1849 est la date de la première utilisation des timbres-poste en France. Un timbre tampon dit « oblitération grille », est prévu pour annuler les timbres-poste sur les lettres.

La grille étant commune à tous les bureaux de poste, l’administration, craignant la fraude, décide de remplacer la grille par un timbre oblitérant à petits chiffres. L’administration classe tous les bureaux par ordre alphabétique et leur attribue un numéro suivant cet ordre. La grille est remplacée par un losange  portant en son centre le numéro du bureau, permettant de reconnaitre l’origine des lettres et de vérifier l’oblitération. En Janvier 1852, il existe 3779 bureaux.

Le bureau d’Aouste a été créé le 1er août 1861 et s’est vu attribué le numéro 4440.

Les chiffres trop petits s’encrassent et donnent des empreintes mal lisibles. La taille des chiffres est alors augmentée. L’administration en profite pour reclasser tous les bureaux dans une nouvelle nomenclature. Aouste est alors le numéro 123. Cette oblitération est utilisée jusqu’en 1976. Depuis cette date, on oblitère les timbres par un cachet rond à date.

Plaques de facteurs ruraux et locaux (Second Empire et IIIe République)

 


Le personnel de la Poste d’Aouste à des dates différentes

 

Années

Receveur(se)

Facteurs

   

1897

Mr Blanc

Charlaix, Brachet, Boyer et Rouy

1898 à 1900

Mme Cordeil

Charlaix, Brachet, Boyer et Rouy

1901

Mme Cordeil

Raoux, Boyer et Rouy

1902

Mme Cordeil

Raoux, Boyer et Rouy, Jacquet et Bourelly

1903

Mme Cordeil

Bouvat, Raoux, Boyer , Rouy, Rouveyre et Bourelly

1904 à 1907

Mme Cordeil

Teyssier, Raoux, Genevès, Rouy, Rouveyre et Bourelly

1908

Mme Cordeil

Raoux, Genevès, Rouy, Rouveyre, Bourelly, Lantheaume et Berger

1909-1910

Mme Cordeil

Brès, Géry, Rouy, Rouveyre, Bourelly, Archinard et Andéol

1911

Mme Cordeil

Roussin, Géry, Rouy, Rouveyre (2) et Archinard

1912

Mlle Cornu

Roussin, Géry, Rouy, Rouveyre, Archinard et Béatrix E.

1913

Mlle Cornu

Chiffe, Géry, Rouy, Rouveyre, Archinard et Béatrix E.

1920

Mlle Cornu

Pimpin (1), Géry, Roux, Rouveyre, Archinard et E.Béatrix.

1921à 1930

Mlle Cornu

Pimpin, Géry, Roux, Rouveyre, Debeaux et Mathieu

1931

Mlle Cornu

Pimpin, Géry, Rouveyre, Deheaux et Mathieu

1932

Mlle Bordel

Pimpin, Géry, Rouveyre, Deheaux et Mathieu

(1) Pimpin Auguste facteur rural en 1942 et Guilhaud Robert facteur à partir de 1957

(2) Extrait du Bulletin Officiel des Postes et Télégraphes 1911 :M. Rouveyre, facteur rural à Aouste (Drôme), a prêté son concours à l’arrestation d’un malfaiteur recherché par la gendarmerie.

D.B – C.G

 


Info
: Voir aussi  le livre édité par Histoire et Patrimoine Aoustois – réédition     de 2019

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