Sommaire
TogglePhilippe Guillery14, bandit du Poitou
Avec sa bande, disciplinée comme à l’armée, composée d’une trentaine d’hommes, il commit ses forfaits dans une zone qui allait de Rouen à Bordeaux, mais dont l’épicentre fut le Bas-Poitou, l’actuelle Vendée.
Aussi généreux que Robin des Bois, qui prenait aux riches pour donner aux pauvres, plus fort que Cartouche, plus rusé que Mandrin…, Guillery a lutté 8 ans contre la force publique de son époque. Moins célèbre, il en est cependant restée une comptine qu’on chantait encore au milieu du XXe siècle, en formant une ronde dans les cours d’école.
Reproches du capitaine Guillery faits aux Carabins, Picoreurs et Pillards de l’armée de Messieurs les Princes.
1615
Reproches du capitaine Guillery 1 faits aux Carabins13, Picoreurs et Pillards de l’armée de Messieurs les Princes.
À Paris, de l’imprimerie d’Anthoine du Brueil, entre le pont Saint-Michel et la rue de la Harpe, à l’Estoille couronnée.
Ha ! mes frères, vous déshonorez l’État. Est-ce ainsi qu’on se comporte à la guerre, où tout d’un coup le valet veut être maître, où le pigeon veut voler avant qu’avoir des ailes, où l’écolier veut sortir de l’école avant que d’avoir rendu les actes et les preuves de sa profession ?
Du temps que Guillery j’étais, on me voyait marcher sous les cornettes du feu duc de Mercœur2, et je me fis tellement sous la conduite d’un chef si important que je devins fort grand conseiller, subtil aux entreprises, et fort grand de courage ; bref, ayant acquis toutes les marques d’un bon soldat, on me donna une compagnie, en la conduite de laquelle je m’acquittai de ma charge avec autant de modestie et vaillance que capitaine de mon temps. J’étais toujours le premier aux escarmouches, et ne demandais qu’à remuer le fer toujours au milieu du feu et du sang, et jamais ne m’amusais au pillage, l’estimant une chose indigne de ma valeur.
Ce n’est pas là la vie que vous voulez mener, frères : car je vois bien, par les procédures que vous tenez au commencement de cette guerre, que vous n’avez le cœur qu’à la volerie, qu’au pillage et butin, poltrons que vous êtes, soldats de rapine, oiseaux de proie3 ; aussi ne vous fussiez-vous jamais enrôlé sous les chefs qui vous conduisent, n’eût été la belle espérance qu’on vous donna de demeurer maîtres de la campagne et vous laisser vivre avec toute sorte de liberté. Ô pendards ! on en pendra tant4 !
Quant Guillery j’étais, combattant sous les enseignes de mon maître et bon seigneur, je n’avais du sang et de la vie que pour dépendre libéralement à son service, espérant qu’après avoir souffert une infinité de plaies, passé et traversé dix mille dangers, le résidu de ma meilleure fortune consisterait en sa bonne affection. Mais quoi ! je fus malheureux : car, pour avoir bien et fidèlement servi, le sort de ma fortune me rendit misérable et me précipita aux hasards peu honnêtes qui, finalement, m’ont conduit au supplice.
Mais vous ne commencez encore qu’à travailler, et déjà vous vous payez par vos mains ; servant vos maîtres et chefs par vos actions et menées, vous leur acquérez les plus glorieux titres du monde ; lesquels, au lieu qu’ils croient avoir des gens de bien avec eux, ils n’ont que des larrons, que des voleurs et des pendards, qui ne se soucient ni du service ni de la bonne affection de leurs chefs. En reconnaissance de leur mérite, on leur en pendra tant !
Ainsi, me voyant frustré de mes espérances, m’ayant délaissé, je me laissé emporter au désespoir, laissant abâtardir mon courage, ne trouvant plus durant la paix où l’exercer généreusement ; je fis ma retraite, de rage et de dépit, aux bois et aux forets, pour avancer ma main sur les passants et abandonner mes désirs aux pillages sur les moyens d’un chacun ; mais ce ne fut qu’après avoir perdu la saison et le temps de pouvoir exercer ma valeur.
Mais vous autres qu’on conduit aux exercices des armes, qu’on mène sur les lieux au prétendu service du roi, où vous avez l’âme poltronne et coyonne (sans énergie ), qu’au lieu de ce faire vous épeiez (tuez avec une épée) les pauvres paysans : on en pendra tant !
Bien que Guillery je fusse plongé en ce désespoir et en ce dernier dépit, comme fort robuste et redouté, je me trouvai assisté de beaucoup de gens qui attachèrent leur vie et leur fortune au même hasard que la mienne, où ramassant l’écume de toute la haute et basse Bretagne, Poitou et autres pays ; je me trouvai accompagné de plus de quatre cens hommes, tous de fait et de mise5.
Mais vous autres êtes trop lâches et gourmands ; vous avez la peau trop tendre pour l’étendre si loin et pour attirer à vous tant d’adjoints ; vous ne voulez pas tant de suite pour faire vos pilleries ; aussi auriez-vous peur que le butin de vol ne fût assez ample ; si vous êtes seulement douze ou quinze d’une bande après la maison de quelque laboureur, vous entre-mangez encore, comme chiens et chats et vilains, à qui montera le premier dessus la fille ou la chambrière de la maison et à qui aura la bourse. Au diable soit la canaille ! On en pendra tant !
Quant Guillery j’étais, je me rangeai premièrement dans la forêt de Machechou en Ray, où je dressé ma puissante forteresse pour la retraite sûr de moi et des miens au retour de nos chasses.
Mais pour vous, vous n’avez pour retraites bien sures que la campagne et quelques méchantes tavernes, où vous arrivez aujourd’hui en l’une, demain en l’autre, sans prendre garde si les prévôts ne vous suivent point. Ô frères, vous êtes trop impudents en ce métier ! On en pendra tant !
Assuré et résolu que j’étais, je trouvai une fois un homme sur le chemin de Nantes, qui s’en allait solliciter un procès, et me disant qu’il n’avait point d’argent. À force de prier Dieu, je découvrais qu’il lui était venu quatre cents écus en sa pochette ; alors lui et moi nous les comptâmes, et, après les avoir comptés, nous partagions également, comme frères, sans autre bruit ni disputes, telle qu’elle fût.
Voyez, frères, voyez si vous êtes de si bonne amitié ; déjà vous êtes bien rogues, et ne vaudriez rien à torcher le cul, car vous êtes trop rudes et mal gracieux ; aussi n’aurez-vous jamais rien : car, quand vous trouvez le pauvre marchand en chemin, vous le saluez de chair et de mots, et, pour tout gracieux accueil, le colletez et lui videz sa pauvre bourse, sans vous soucier ce qu’il peut devenir. Ha ! ingrats, méchants et indignes d’être frères de Guillery, on en pendra tant !
Ainsi redouté que j’étais, me transportant en plusieurs lieux, suivant les forêts et attendant le retour des marchands le long des grands chemins, je fus une fois averti que quelques prévôts s’étaient amassés avec leurs archers pour me venir surprendre dans la forêt de Mochemont, qui est près de Rouen6. Là, j’assemblai mes gens et les tirai à quartier, puis envoyai reconnaître les forces des dits prévôts, et moi-même m’y transportai, habillé en paysan ; puis, ayant vu que leurs forces n’étaient battantes pour les miennes, je les allai charger dans la dicte forêt de telle furie que je les mis en fuite, et, ayant tué quelques uns et blessé plusieurs, j’en emmenai six ou sept prisonniers, et, les ayant fait attacher aux arbres, nous prîmes leurs casaques, et nous en allâmes la nuit ensuivant à un château proche de là, appartenant à un président, et, feignant le chercher, lui commandâmes d’ouvrir les portes de par le Roy, à l’instant ouvrir coffres et cabinets, où nous fîmes fort bien nos affaires.
Voyez, frères, voyez si vous aurez jamais tant d’esprit de résister aux prévôts comme nous fîmes et faire de leurs dépouilles si joliment votre profit ; c’est bien au contraire : car, si vous les sentiez venir de loin, quoi que vous fussiez aussi forts, vous auriez la fièvre au cul. Ha ! pauvres écoliers, on en pendra tant !
Moi, étant bien armé et associé de bons et valeureux soldats, j’étais la terreur de toute la campagne, épouvante des marchands, et guières (guièrer = combattre) les prévôts ne venaient me chercher, pour ce que je leur faisais mauvaise escorte et au gros des bois faisais planter des poteaux où j’écrivais ces mots : « La mort aux prévôts, la corde aux archers7 ! » Nul n’approche ces lieux qui ne soit bien suivi.
Mais vous, nouveaux picoreurs8, vous ne valez rien que pour piller le bon homme, que pour détrousser les marchands et rançonner le monde. Allez, la corde à telles gens que vous, qui n’avez du courage que contre un homme seul. Guillery, de son temps, ne voulait à sa suite de si lâches poltrons.
Quand je trouvais quelqu’un parmi les chemins, je lui demandais où il allait, d’où il venait et quel il était ; je m’enquêtais en suite des finances qu’il avait, et, après l’avoir fouillé et particulièrement visité, si je ne lui trouvais argent suffisamment pour accomplir son voyage, je lui en donnais du mien ; s’il en avait plus qu’il n’en avait besoin pour achever son chemin, nous le comptions et partissions comme frères, et, cela fait, le laissais aller sans lu y faire aucun autre tort ni dommage.
Voyez si vous êtes de si bonne conscience ; je tiens pour tout assuré que vous n’auriez garde de faire le semblable ; je vous tiens d’un tel naturel, et l’expérience le monstre, que vous arracheriez volontiers le cœur des pauvres gens, puis que, les ayant tous volés, pillés et dérobés, encore leur mettez-vous le poignard sous la gorge pour leur faire confesser, de force ou de gré, s’ils n’ont point détourné quelque partie de leur bien ; vous leur donnez le fronteau9, vous leur serrez les pouces avec les rouets10 d’arquebuse. Ha ! quelle désolation ! Vous êtes des bourreaux sans miséricorde, vous en serez payez au double, car il n’y a point de supplice qui puisse égaler vos forfaits et démérites. On disait l’an passé que, vous étant en Poitou, après vous avoir rendus soûls comme bougres11, enivrés jusqu’à jeter le vin par la gorge, par le nez et par les yeux, misérables que vous êtes, vous renversiez les muids de vin dans les puits à faute de contenter vos maudites volontés par argent. Mais, quoi ! que dit-on de vous en cette armée ? Je ne sais si je dois croire : on dit que, pour avoir de l’argent, vous dépouillez les hommes à leur chemise, et les battez et outragez de telle sorte que plusieurs en sont morts. Au diable soit donné votre race ; vous aurez bonne issue de tout ceci un de ces matins.
Moi, Guillery, ayant été si consciencieux, si fidèle, si accostable et si peu soucieux de ces richesses du monde, si ennemi des meurtriers, pour avoir fui, haï le meurtre, le sang et la cruauté ; pour avoir été si doux et si clément envers les marchands que de ne prendre que la moitié de leur argent, pour leur en avoir donné quand ils n’en avaient point pour parachever le résidu de leur voyage ; pour n’avoir fait si bonne composition avec les simples ; si, dis-je, pour avoir été de cet humeur en cet indigne état de voleur, je n’ai pas laissé d’être pris, poursuivi et mené par les prévôts, archers et sergents dans la ville de La Rochelle, où mon procès me fut fait, et moi condamné à être rompu tout vif sur une roue12, que devez-vous être donc, meurtriers inhumains, voleurs insignes, brigands et larrons, qui sans merci et sans miséricorde volez et dérobez tout ce qui se rencontre sous vos mains, qui mettez dehors des maisons les femmes pleurant et gémissant avec leurs petits enfants entre leurs bras, contraintes de s’en aller chercher ailleurs leur meilleure aventure avec un bâton blanc en la main ; leurs pauvres maris en fuite, contraints de renoncer à tout, aimant mieux soupirer leur malheur à l’ombre d’un buisson que vivre avec vous toute sorte de tyrannie, de félonie et de barbarie ; et quelle pitié, frère, d’entendre aujourd’hui parler de vous en comparaison :
Guillery fut en sa jeunesse
Carabin rempli de valeur ;
Puis, déclinant vers sa vieillesse.
Devint un insigne voleur.
Mais jamais il ne se dira de lui les choses que quatre des meilleures provinces de notre France publieront à l’advenir de vous, et je vois l’heure qu’un de ces matins qu’on fera une telle perquisition de votre vie enragée et de tant de voleries que vous avez faites contre la volonté des dits sieurs les princes, car je le crois ainsi, qu’il ce fera une telle exécution de vos charognes qu’il n’y aura rien d’oublié du pareil qu’il se fit durant les derniers troubles, à la penderie de Bretagne faite par le comte de Lamoignon, commandant pour lors à un régiment pour feu monsieur le duc de Mercœur. Cela vous est tout acquis, et n’en espérez pas moins, car vous méritez cent fois plus, et ne sais ce que c’en sera. Sa Majesté en reçoit tous les jours des plaintes et recevra encore plus que jamais dorénavant, par tant de familles que vous avez ruinées et mises au blanc. Telle sera votre fin, telle la récompense de vos beaux faits, tels les salaires de vos courses, et tel le prix destiné aux plus cruels et félons voleurs du monde, ainsi que chacun vous a reconnus.
Notes
1. – Capitaine Guillery – Voir aussi l’article sur la capture du capitaine Guillery. Celle-ci contient quelques faits nouveaux sur lui et sur les bandits qui pillaient à son exemple et renchérissement même sur ses ravages.
2. – Duc de Mercoeur – Voir aussi l’article sur la capture du capitaine Guillery
3. oiseaux de proie – Ce que fit le brigand Carrefour, enrôlé quelque temps dans le parti du duc de Nevers, est bien une preuve de la vérité de ce qu’on lit ici.
4. pendra – Cette exclamation revient comme une sorte de refrain à la fin de plusieurs paragraphes.
5. mise – C’est à peu près ce qu’on lit textuellement dans l’article sur la capture du capitaine Guillery
6. Rouen – Guillery poussait en effet ses entreprises jusqu’à Rouen ; voir l’article sur la capture du capitaine Guillery . Le coup de main dont le récit suit ne se trouve pas raconté dans la première pièce que nous avons donnée.
7. archers – Cette devise de Guillery est donnée autrement dans le Journal de l’Estoille (11 sept. 1608) : « Ils avoient pris pour devise, qu’ils avoient affichée en plusieurs arbres de grands chemins : Paix aux gentilshommes, la mort aux prevosts et archers et la bourse aux marchands. Ce qu’ils ont réellement exécuté maintefois, ayant tué tous les prevosts et archers qui estoient tombés entre leurs mains et devalisé les marchands. En sorte que, dans ces derniers temps, personne n’ose negotier ni aller aux foires à trente et quarante lieues de la retraite de ces voleurs. »
8. – picoreurs – Les mots picoreur, picorer, que Ménage, d’accord en cela avec le Dictionnaire des rimes de La Noue, p. 35, dérive du latin pecorare, enlever des troupeaux, étoient arrivés dans la langue vers le temps d’Estienne Pasquier. Voir ses Recherches de la France, livre 3, ch. 8. On se rappelle la jolie phrase des contes d’Eutrapel sur ces gens de maraude « accoustrés de bons habillements que la damoiselle Picorée avoit faits et filés ». Ce n’était pas seulement au temps des guerres que les soldats vivaient de ces pillages, ils n’en faisaient pas moins lorsqu’ils alloient pacifiquement par les provinces à la suite du roi. Un des Nouveaux satires d’Angot, sieur de L’Éperonnière, intitulé Les picoreurs, nous apprend ce que le voyage de Louis XIII, en 1620, coûta ainsi aux riches campagnes de la Normandie :
. . . . . . . . . . Un jeune pitaut me dit tout esperdu,
Les soldats sont au bourg, Monsieur, tout est perdu !
Cette engeance d’enfer, que la faim espoinçonne,
Froisse tout, pille tout, sans respect de personne ;
Ils ont le diable au corps, et jurent devant tous
Que, par la digne tête, ils logeront chez vous.
J’aurois, j’aurois horreur de vous dire de bouche
Le desastre qu’ils font et dont le cœur me touche,
Ce ne sont point soudars, ce sont des picoreurs,
Qui sont de l’Ante-Christ les vrais avan-coureurs ;
Leurs buletins sont faits, et déjà par la voie,
Comme loups affamés, ils courent à la proie.
Ils ont presque tué Flipin d’un coup d’estoc,
En defendant Janet, ses poulet et son coq ;
Ils ont rompu son meuble, et sa feme Isabelle
A perdu son sanfaix, son fil et sa cordelle ;
Ils ont mangé sa cresme, ils ont son lard ravy.
Jamais un tel desordre au monde je ne vy.
9. – fronteau – C’était un genre de torture exercé sur les paysans par ces bandits, et qui consistait à serrer violemment avec de fortes cordes le front du patient jusqu’à ce qu’il eût dit où se trouvait tout ce qu’il avait d’argent.
10. – rouets – C’est-à-dire qu’ils leur serraient les pouces dans les ressorts de leurs arquebuses à rouets. Les locutions, encore populaires, serrer les pouces, faire mettre les pouces à quelqu’un, pour le faire céder, doivent venir de là.
11. – bougres – C’est-à-dire comme les Bulgares. Ils partageaient alors la réputation d’ivrognerie des Polonais, leurs voisins.
12. – roue – Il fut, en effet, rompu vif à Le Rochelle . La destruction de la bande de Guillery fut considérée comme un si grand bienfait pour les provinces ainsi délivrées que Henri IV accorda des lettres d’anoblissement à A. Legeay, l’un de ceux qui y avoient le plus contribué. Ces lettres ont été publiées par M. B. Fillon dans la Revue des provinces de l’ouest, nº de décembre 1856.
13. Carabin – Soldat armé d’une carabine, chargé de harceler l’ennemi remplacé par le « dragon »
14 – Philippe Guillery : Alors qu’il est souvent présenté comme un seigneur poitevin (ou breton selon les sources), un rapport de police donne la certitude de la naissance de Philippe Guillery en 1566.
Des rares documents qui nous restent de l’épopée de Guillery, celui du prévôt Le Geay est parmi les plus dignes de foi. C’est ce rapport de police qui donne la certitude de la naissance de Philippe Guillery. Il indique en vieux français que ce « capitaine des voleurs du Bas-Poitou était fils d’un maçon demeurant dans un village appelé Les Landes, paroisse du bourg de Boulogne, au dit pays de Bas-Poitou ». Toujours dans le même rapport, il précise que Philippe et ses frères furent également « laquais d’un sieur de Garnaud, gentilhomme voisin à Saint-Christophe-du-Ligneron, à une lieue de Légé ».
Guillery ne fut pas un enfant de choeur. Ni tout à fait un Robin des bois qui prenait aux riches pour redonner aux pauvres. Mais il défia plus de 8 ans la force publique de son époque, la ridiculisant souvent, ce qui lui valut une grande popularité et la complicité du peuple assurant « qu’il avait un génie qui le transportait où il voulait en un moment ». Mais il irrita le roi Henri IV en personne qui demanda à son ministre Sully d’employer les grands moyens. Il faut dire que Philippe Guillery fut d’abord un soldat des Guerres de Religion, homme de cheval et d’épée qui combattit dans les rangs de la Ligue sous les ordres du duc de Mercoeur.
Réduit au « chômage » après l’Édit de Nantes (1598), il tenta de se ranger et devint drapier à Machecoul. Mais rongé par l’ennui, il préféra partir avec une troupe de comédiens, avec lesquels il apprit à se grimer, à changer sa voix, à déclamer des poèmes, choses qui lui furent bien utiles une fois hors-la-loi. Avec sa bande, disciplinée comme à l’armée, composée d’une trentaine d’hommes (les fameux « compères Guillery ») dont plusieurs de ses frères de sang, il commit ses forfaits dans une zone qui allait de Rouen à Bordeaux, mais dont l’épicentre fut le Bas-Poitou, l’actuelle Vendée, qu’il connaissait bien. Il dépouillait tout particulièrement les marchands, les moines et les bourgeois. Il ne leur prenait jamais tout et leur remettait un « billet de liquidation » à présenter en cas de nouvel assaut. Il n’hésita pas à s’attaquer aux prévôts de Niort, de La Rochelle et de Fontenay-le-Comte, mais aussi au trésorier du roi de Saint-Michel-en-l’Herm…
Philippe Guillery pendit de sa propre main le bourreau de Nantes qui avait roué plusieurs de ses compagnons. Il mit à sac les châteaux de Mareuil et des Essarts mais faillit être pris dans l’attaque du château de Sainte-Hermine et s’échappa de justesse du siège de son repaire du Bois-Patuyau, près de La Merlatière. Il s’enfuit et vécut un certain temps dans le hameau de Saint-Justin, sur les bords de la Dordogne, près de Bordeaux. Mais il fut reconnu, échappa à une embuscade, réussit à s’enfuir à Royan où il tomba dans un nouveau piège. Cette fois-ci, c’était la fin. Il fut rapidement jugé à La Rochelle et condamné à être rompu vif sur la roue. Son supplice eut lieu le 25 novembre 1608, à Saintes. Le bourreau lui brisa méthodiquement les membres avec une lourde barre de fer. Puis il frappa la poitrine et Philippe expira presque aussitôt, sans avoir jeté un seul cri.
Reproches du capitaine Guillery faits aux Carabins, Picoreurs et Pillards de l’armée de Messieurs les Princes. (Texte d’origine)
À Paris, de l’imprimerie d’Anthoine du Brueil, entre le pont Saint-Michel et la rue de la Harpe, à l’Estoille couronnée.
M.DC.XV. In-8.
Ha ! mes frères, vous déshonorez l’Etat. Est-ce ainsi qu’on se comporte à la guerre, où tout d’un coup le valet veut estre maistre, où le pigeon veut voller avant qu’avoir des aisles, où l’escolier veut sortir de l’escolle avant que d’avoir rendu les actes et les preuves de sa profession ?
Du temps que Guillery j’estois, on me voyoit marcher sous les cornettes du feu duc de Mercœur, et je me fis tellement sous la conduitte d’un chef si important que je devins fort grand conseiller, suptil aux entreprises, et fort grand de courage ; bref, ayant acquis toutes les marques d’un bon soldat, on me donna une compagnie, en la conduite de laquelle je m’acquitay de ma charge avec autant de modestie et vaillance que capitaine de mon temps. J’estois tousjours le premier aux escarmouches, et ne demandois qu’à remuer le fer tousjours au milieu du feu et du sang, et jamais ne m’amusois au pillage, l’estimant une chose indigne de ma valeur.
Ce n’est pas là la vie que vous voulez mener, frères : car je voy bien, par les procedures que vous tenez au commancement de ceste guerre, que vous n’avez le cœur qu’à la volerie, qu’au pillage et butin, poltrons que vous estes, soldats de rapine, oyseaux de proye ; aussi ne vous fussiez-vous jamais enrollé sous les chefs qui vous conduisent, n’eût esté la belle esperance qu’on vous donna de demeurer maistres de la campagne et vous laisser vivre avec toute sorte de liberté. Ô pendards ! on en pendra tant !
Quant Guillery j’estois, combattans sous les enseignes de mon maistre et bon seigneur, je n’avois du sang et de la vie que pour despendre liberallement à son service, esperant qu’après avoir souffert une infinité de playes, passé et traversé dix mille dangers, le residu de ma meilleure fortune consisteroit en sa bonne affection. Mais quoy ! je fus malheureux : car, pour avoir bien et fidellement servy, le sort de ma fortune me rendit miserable et me precipita aux hazards peu honnestes qui, finallemeni, m’ont conduit au supplice.
Mais vous ne commencez encore qu’à travailler, et desjà vous vous payez par vos mains ; servans vos maistres et chefs par vos actions et menées, vous leur acquerez les plus glorieux tiltres du monde ; lesquels, au lieu qu’ils croyent avoir des gens de bien avec eux, ils n’ont que des larrons, que des volleurs et des pendars, qui ne se soucient ny du service ny de la bonne affection de leurs chefs. En recognoissance de leur merite, on leur en pendra tant !
Ainsi, me voyant frustré de mes esperances, m’ayant delaissé, je me laissé emporter au desespoir, laissant abastardir mon courage, ne trouvant plus durant la paix où l’exercer genereusement ; je feis ma retraicte, de rage et de despit, aux bois et aux forests, pour avancer ma main sur les passans et abandonner mes desirs aux pillages sur les moyens d’un chacun ; mais ce ne fut qu’après avoir perdu la saison et le temps de pouvoir exercer ma valleur.
Mais vous autres qu’on conduit aux exercices des armes, qu’on mène sur les lieux au pretendu service du roy, où vous avez l’ame poltronne et coyonne, qu’au lieu de ce faire vous espiez les pauvres paysans : on en pendra tant !
Bien que Guillery je fusse plongé en ce desespoir et en ce dernier despit, comme fort robuste et redouté, je me trouvay assisté de beaucoup de gens qui attachèrent leur vie et leur fortune au mesme hazard que la mienne, où ramassant l’escume de toute la haute et basse Bretagne, Poictou et autres pays ; je me trouvay accompagné de plus de quatre cens hommes, tous de faict et de mise.
Mais vous autres estes trop lasches et gourmands ; vous avez la peau trop tendre pour l’estendre si loing et pour attirer à vous tant d’adjoints ; vous ne voulez pas tant de suitte pour faire vos pilleries ; aussi auriez-vous peur que le butin de vol ne fût assez ample ; si vous estes seulement douze ou quinze d’une bande après la maison de quelque laboureur, vous entre-mangez encore, comme chiens et chats et villains, à qui montera le premier dessus la fille ou la chambrière de la maison et à qui aura la bourse. Au diable soit la canaille ! On en pendra tant !
Quant Guillery j’estois, je me rangeay premierement dans la forest de Machechou en Ray, où je dressé ma puissante forteresse pour la retraicte seure de moy et des miens au retour de nos chasses.
Mais pour vous, vous n’avez pour retraictes bien seures que la campagne et quelques meschantes tavernes, où vous arrivez aujourd’huy en l’une, demain en l’autre, sans prendre garde si les prevosts ne vous suivent point. Ô frères, vous estes trop impudents en ce mestier ! On en pendra tant !
Assuré et resolu que j’estois, je trouvay une fois un homme sur le chemin de Nantes, qui s’en alloit solliciter un procez, et me disant qu’il n’avoit point d’argent. À force de prier Dieu, je decouvray qu’il luy estoit venu quatre cens escus en sa pochette ; alors luy et moy nous les comptasmes, et, après les avoir comptés, nous partissons esgallement, comme frères, sans autre bruit ny disputes, telle qu’elle fust.
Voyez, frères, voyez si vous estes de si bonne amitié ; jà vous estes bien rogues, et ne vaudriez rien à torcher le cul, car vous estes trop rudes et mal gracieux ; aussi n’aurez-vous jamais rien : car, quand vous trouvez le pauvre marchand en chemin, vous le saluez de chair et de mots, et, pour tout gracieux accueil, le colletez et luy vuidez sa pauvre bourse, sans vous soucier ce qu’il peut devenir. Ha ! ingrats, meschans et indignes d’estre frères de Guillery, on en pendra tant !
Ainsi redouté que j’estois, me transportant en plusieurs lieux, suivant les forests et attendant le retour des marchands le long des grands chemins, je fus une fois adverty que quelques prevots s’estoient amassez avec leurs archers pour me venir surprendre dans la forest de Mochemont, qui est près de Rouen. Là, j’assemblay mes gens et les tiray à quartier, puis envoyay recognoistre les forces des dicts prevots, et moy-mesme m’y transportay, habillé en paysan ; puis, ayant veu que leurs forces n’estoient bastantes pour les miennes, je les allay charger dans la dicte forest de telle furie que je les mis en fuitte, et, ayant tué quelques uns et blessé plusieurs, j’en emmenay six ou sept prisonniers, et, les ayant faict attacher aux arbres, nous prîmes leurs casaques, et nous en allasmes la nuict ensuivant à un chasteau proche de là, appartenant à un president, et, feignant le chercher, luy commandasmes d’ouvrir les portes de par le Roy, à l’instant ouvrir coffres et cabinets, où nous fismes fort bien nos affaires.
Voyez, frères, voyez si vous aurez jamais tant d’esprit de resister aux prevosts comme nous fismes et faire de leurs despouilles si joliment vostre profit ; c’est bien au contraire : car, si vous les sentiez venir de loing, quoy que vous fussiez aussi forts, vous auriez la fiebvre au cul. Ha ! pauvres escoliers, on en pendra tant !
Moy, estant bien armé et associé de bons et valleureux soldats, j’estois la terreur de toute la campagne, l’espouvante des marchands, et guières les prevosts ne venoient me chercher, pour ce que je leur faisois mauvaise escorte et au gros des bois faisais planter des poicteaux où j’escrivois ces mots : « La mort aux prevosts, la corde aux archers ! » Nul n’approche ces lieux qui ne soit bien suivy.
Mais vous, nouveaux picoreurs, vous ne vallez rien que pour piller le bon homme, que pour destrousser les marchands et rançonner le monde. Allez, la corde à telles gens que vous, qui n’avez du courage que contre un homme seul. Guillery, de son temps, ne vouloit à sa suitte de si lasches poltrons.
Quand je trouvois quelqu’un parmy les chemins, je luy demandois où il alloit, d’où il venoit et quel il estoit ; je m’enquestois en suitte des finances qu’il avoit, et, après l’avoir fouillé et particulierement visité, si je ne luy trouvois argent suffisamment pour accomplir son voyage, je luy en donnois du mien ; s’il en avoit plus qu’il n’en avoit besoin pour achever son chemin, nous le comptions et partissions comme frères, et, cela fait, le laissois aller sans lu y faire aucun autre tort ny dommage.
Voyez si vous estes de si bonne conscience ; je tiens pour tout asseuré que vous n’auriez garde de faire le semblable ; je vous tiens d’un tel naturel, et l’experience le monstre, que vous arracheriez volontiers le cœur des pauvres gens, puis que, les ayant tous vollez, pillez et desrobez, encore leur mettez-vous le poignard sous la gorge pour leur faire confesser, de force ou de gré, s’ils n’ont point destourné quelque partye de leur bien ; vous leur donnez le fronteau, vous leur serrez les poulces avec les rouets d’arquebuze. Ha ! quelle desolation ! Vous estes des bourreaux sans misericorde, vous en serez payez au double, car il n’y a point de supplice qui puisse esgaller vos forfaits et demerites. On disoit l’an passé que, vous estans en Poictou, après vous avoir rendus souls comme bougres, enyvrez jusques à jetter le vin par la gorge, par le nez et par les yeux, miserables que vous estes, vous renversiez les muids de vin dans les puits à faute de contenter vos maudites volontez par argent. Mais, quoy ! que dict-on de vous en ceste armée ? Je ne sçay si je dois croire : on dit que, pour avoir de l’argent, vous despouillez les hommes à leur chemise, et les battez et outragez de telle sorte que plusieurs en sont morts. Au diable soit donné vostre race ; vous aurez bonne issuë de tout cecy un de ces matins.
Moy, Guillery, ayant esté si consciencieux, si fidelle, si accostable et si peu soucieux de ces richesses du monde, si ennemy des meurtriers, pour avoir fui, hay le meurtre, le sang et la cruauté ; pour avoir esté si doux et si clement envers les marchands que de ne prendre que la moitié de leur argent, pour leur en avoir donné quand ils n’en avoyent point pour parachever le residu de leur voyage ; pour n’avoir fait si bonne composition avec les simples ; si, dis-je, pour avoir esté de cet humeur en cet indigne estat de volleur, je n’ay pas laissé d’estre prins, poursuivy et mené par les prevots, archers et sergens dans la ville de La Rochelle, où mon procez me fut faict, et moy condamné à estre rompu tout vif sur une roue, que devez-vous estre donc, meurtriers inhumains, volleurs insignes, brigands et larrons, qui sans mercy et sans misericorde vollez et desrobbez tout ce qui se rencontre sous vos mains, qui mettez dehors des maisons les femmes pleurans et gemissans avec leurs petits enfans entre leurs bras, contraintes de s’en aller chercher ailleurs leur meilleure advanture avec un baston blanc en la main ; leurs pauvres maris en fuitte, contraints de renoncer à tout, aymant mieux souspirer leur malheur à l’ombre d’un buisson que vivre avec vous toute sorte de tyrannie, de felonnie et de barbarie ; et quelle pitié, frère, d’entendre aujourd’huy parler de vous en comparaison :
Guillery fut en sa jeunesse
Carabin remply de valeur ;
Puis, declinant vers sa vieillesse.
Devint un insigne volleur.
Mais jamais il ne se dira de luy les choses que quatre des meilleures provinces de nostre France publieront à l’advenir de vous, et je voy l’heure qu’un de ces matins qu’on fera une telle perquisition de vostre vie enragée et de tant de volleries que vous avez faictes contre la volonté des dicts sieurs les princes, car je le croy ainsi, qu’il ce fera une telle execution de vos charongnes qu’il n’y aura rien d’oublié du pareil qu’il se fit durant les derniers troubles, à la penderie de Bretaigne faicte par le comte de Lamoignon, commandant pour lors à un regiment pour feu monsieur le duc de Mercœur. Cela vous est tout acquis, et n’en esperez pas moins, car vous meritez cent fois plus, et ne sçay ce que c’en sera. Sa Majesté en reçoit tous les jours des plaintes et recevra encore plus que jamais d’oresnavant, par tant de familles que vous avez ruinées et mises au blanc. Telle sera vostre fin, telle la recompense de vos beaux faicts, tels les salaires de vos courses, et tel le prix destiné aux plus cruels et felons voleurs du monde, ainsi que chacun vous a recogneus.
La capture du capitaine Guillery – La prinse et deffaicte du capitaine Guillery, qui a été pris avec 62 volleurs de ses compagnons.
1609
Texte d’origine
La prinse et deffaicte du capitaine Guillery, qui a été pris avec 62 volleurs de ses compagnons, qui ont estez roués en la ville de La Rochelle le vingt-cinquiesme de novembre 1608 ; avec la complainte qu’il a faict avant que mourir.
Paris, jouxte la coppie imprimée à La Rochelle par les heritiers de Jerosme Hautain. 1609.
In-8º1.
La malice piaffe pour un temps, et depuis que l’homme a faict alliance avec l’ennemy de son salut, bronchant parmy les tenèbres de son erreur, il ne cesse de courir à perte d’aleine jusques à ce qu’il se trouve sur le bord du precipice, où, à la fin, l’autheur de ses debauches le fait trebucher et en fait un joüet d’un funeste supplice et le spectacle d’une piteuse tragédie. Il a ouvert la fosse (dit le prophète) et l’a creusée, et est tombé en l’abisme qu’il a fait. Dieu les laisse courir pour un peu, jusqu’à temps que le comble de leur malice soit accompli ; mais en fin, ne pouvant supporter la calamité que ses boutefeux attisent parmy son peuple, vaincu par les cris de ceux que la force a piteusement conversé en terre, il esveille les flammes de sa colère et ouvre la main aux foudres de sa justice, pour leur faire engloutir ces serviteurs du grand dragon sous les flots d’une sevère punition, où il leur faict gouster le fiel de leur malice.
Un Guillery, ou plustost un vray monstre à la nature, que l’enfer a vomy du plus profond de ses abysmes, pour luy faire enfanter une infinité de volleries et brigandages, s’en est toujours allé suyvant sa brizée, jusques à ce qu’il s’est filé le cordeau qui luy pend sur la teste, et a dejà attaché son frère sur le posteau d’un sevère supplice, là où, pour toute la recompense de toutes meschancetez qu’il a cruellement exercez envers plusieurs marchands, il a laissé la vie sur une roüe parmy les tourmens et les bourreaux. Mais il faut entendre les moyens par où il a esté acheminé à ce pas, et marquer icy en passant quelques traits de sa malice, bien qu’elle se soit assez fait cognoistre par toute la France au bruit qui a remply les oreilles d’un chacun.
Ce Guillery estoit d’une grand maison de Bretaigne, dont je tairay le nom de peur d’offencer quelqu’un2, et a monstré assez clairement parmy le feu de nos guerres civiles qu’il estoit homme resolu et de courage, de façon que, s’amusant plustost à remuer le fer parmy le gros des ennemis, où sa valeur le conduisoit, que au pillage, comme font coustumierement les ames casanières, ses esperances l’ont trompé à fin, qui luy promettoient un orage perpetuel en nos fureurs civiles, et pensoit bien que, pourveu que la guerre peut tousjours escumer ses bouillons, rien ne luy manqueroit, veu mesmes qu’il estoit fort affectionné de feu monsieur le duc de Mercure3 à cause de sa vaillance ; mais quoy ! il y a des revolutions ordinaires au cours des affaires humaines que la providence de l’homme ne peut penetrer, et, lorsqu’il pense tenir le feste de ce qu’il pretendoit, il ne faut qu’un tourbillon de la fortune pour la raser au bas de sa roüe, où elle lui fait sentir les effects d’inconstance.
Ainsi Guillery, se voyant demeuré à sec par le calme de la paix, qui fit incontinent rassoir les vagues de la tourmente, et ses esperances esvanoüies avec les brouillards de la guerre, se laisse gaigner au desespoir, qui luy fait prendre les bois, et, laissant abastardir la vigueur de son courage et rouiller ses conceptions guerrières à faute de moyens et d’exercice où il se peut tenir en haleine, il advance sa main meurtrière sur le passant et ses desirs au pillage ; de ses moyens et d’un genereux Theseus, il se transforme en un Scyni4 monstrueux et ravisseur. Voilà comme les esprits les plus eslevez se laissent quelquefois aller en cendre, et mesme les âmes les plus asseurées sur le pied de la vertu se laissent une fois brider au vice, ou sont celles qui despeignent plus au vif l’enormité de leur malice.
Luy donc étant robuste et fort redouté, ne manque point d’être suivy de beaucoup de gens de sa sorte, qui attachent leur vie et leur fortune au mesme hazard de la sienne, et entre autres de deux de ses frères, qu’il attire à sa cordelle, et, ramassant aussi l’escume de toute la haulte et basse Bretaigne, Poictou et autres circonvoisins pays, il se trouve accompagné de plus de quatre cens hommes5, tous de fait, et qui ne respiroient autre chose que le carnage.
Estant donc ainsi rangé en un bois6, où il dresse une puissante forteresse, un jour il attend jusques environ sur le midy, couché sur le ventre le long du grand chemin de Nantes7, tant que à la fin il passe un bon-homme, à qui il demande où il alloit, et ayant desjà bien entendu qu’il alloit à Nantes, il feint aussy y vouloir aller. Se mettant en chemin ensemble, demandoit au bon-homme qu’il alloit faire à Nantes ; luy respondit qu’il alloit solliciter un procez. Tu as donc bien de l’argent ? luy dit-il. L’autre s’excuse et dit qu’il n’en avoit point, sinon sept ou huict souls pour son disner. Non ay-je point moy, respondit-il ; mais j’espère que Dieu nous en envoyera. Puis, étant passé un peu plus oultre, et luy ayant encore demandé s’il n’avoit point d’argent, et l’autre ayant dit que non : Or bien, dit-il, prions, Dieu nous en envoyra. Et de ceste façon, tirant un petit manuel de sa pochette, il se met à genoux et y fait mettre ce bon-homme avec luy, puis il luy dist : Regarde s’il t’en est point venu. Il met la main en sa pochette et dit que non. Tu ne pries donc point de bon cœur ? dit-il. L’autre s’excuse et dit que si faisoit ; et disant cela il tire cinq sols de sa pochette et le fait encores prier, et la seconde fois en tire dix, puis quinze, et tousjours le bon-homme ne trouvoit rien. Tu ne prie donc pas de bon cœur ? dit-il, car il t’en viendroit aussi bien qu’à moy. Il dit que si, tant qu’il pouvoit. Or, dit-il, alors tu en as donc bien : car moy, qui ne prie guières de bon cœur, s’il m’en est venu, à plus forte raison à toy aussi, et, partant, je le veux voir. Et disant cela il se met à le fouiller, luy trouve quatre cens escuz, en prend la moitié et le renvoye avec le reste, luy disant : Comment ! tu me veux tromper, et ne me rien donner de ce que Dieu t’envoye en ma compagnie, comme si je n’en devois avoir ma part !
Cela sont les moindres choses, et n’est rien au prix des chasteaux forcés, où ils ont miserablement massacrez les pauvres seigneurs, gentilshommes et damoiselles, emporté leurs moyens et mis leurs maisons en desolation ; et, entre autres, en ayant voulu forcer un autre, S.-Hermine8 et Mareul9 ils furent descouverts par la sentinelle qui y veilloit d’ordinaire, comme s’il eût été en temps de guerre, pour la crainte qu’il avoit d’eux, et leur ayant ladite sentinelle tiré un coup d’arquebuze, ils furent poursuiviz par le seigneur du lieu, qui manda en diligence à quelques gentilshommes ses voisins, et aux villages par là auprès, pour avoir des gens, et ayant en peu de temps ramassez jusques à près de deux cens hommes, tant d’uns que d’autres, il les attint auprès d’un bois à trois lieües de là. Eux, étant jusques au nombre d’environ trente cuirasses, se mettent en défense, et y eut quelques morts, tant d’un costé que d’autre ; mais le monde y abordant à la file de tous costez, comme pour esteindre le brasier qui devoroit le repos de tout le pays, ils furent contrains de se mettre en fuitte, laissans trois ou quatre de leurs compaignons prisonniers, qui furent mis sur la roüe à Bessay10, qui est là auprès.
Que diray-je davantage ? ils prindrent un gentilhomme, grand seigneur de là auprès, et après lui avoir bandé les yeux, ils le menèrent à travers le bois jusques à leur forteresse11, puis, étant là, ils le desboucherent, luy monstrèrent tout là dedans force munitions, tant de guerre que pour le vivre, avec un molin à bras et un four, des petites pièces de campaigne, à force mousquets et arquebuses, picques, grenades, petards et autres engins, tant pour l’offensive que pour la deffensive, puis les autres fortifications des fossez à plein de cuve, un pont-levis avec un ravelin enclos d’une palissade, et, pour dire en un mot, il y remarqua tant de fortifications qu’il luy sembloit imprenable ; ils le menèrent aussi en une grande sale toute tapissée de cuir d’Espagne qu’ils avoyent vollé en une navire le long de la mer12. Mais ainsi que on le conduisoit, Guillery luy mit le pistolet à la gorge, et luy fit jurer sur peine de la vie qu’il ne leur seroit jamais contraire. Après cela, on luy presente le disner, où il fut traité fort magnifiquement, et tout en vesselle d’argent, et puis après s’être bien promenez et bien discouru ensemble, on luy reboucha la veüe, et le ramena-on jusques au bort du bois, d’où on le renvoya.
Mais quoy ? de s’ennuyer de leurs meschancetez et ne plus permettre que ceste trame soit roulée plus avant, tout le monde murmure, et la France ne peut plus supporter ceste peste sur le cœur sans la vomir ; ils s’enflamment tousjours de plus en plus, et se descouvrent eux-mesmes, mettans certains escritaux par les chemins, par lesquels ils decouvrent qu’ils vouloyent la vie de messieurs de la justice, l’argent, le pillage et rençon des gentilshommes ; rencontrent un prevost, le chargent, prennent quelques uns de ses gens, et s’il ne se fût sauvé de legereté, il eût tombé entre leurs mains13 ; de sorte que personne ne pouvoit trafiquer en toute la Bretagne ny le bas Poitou, parce qu’il a un esprit familier, par lequel il se fait porter par tout là où il veut en moins de rien, de façon qu’on le verra quelquefois le matin auprès de Nantes, et le soir il sera autour de Rouen et d’Orléans14, et autres lieux semblables, s’accostans des marchands comme s’ïl estoit aux foires, et puis quand il voist la commodité il les destrousse, et leur oste tous leurs biens. La cour, en étant advertie, mande à Monsieur de Parabole, gouverneur de Niort, et à tous les officiers d’autour, qu’on mît diligence de les attrapper. Ce qu’étant sceu, tous les prevosts s’assemblent jusqu’au nombre de dix-huit ou vingt, conduicts par le grand prevost, avec toute la communauté qu’ils assemblèrent incontinent de toutes parts, jusques au nombre d’environ quatre mille cinq cens hommes, et de ce pas s’en vont assiéger le bois où le gentilhomme qui avoit esté en leur chasteau les mena, et courant de tous costez, ils trouvent à la fin ceste forteresse en un petit vallon, entre force arbres qui la couvroient fort bien de tous costez, de façon qu’à peine pouvoit-on la descouvrir.
Ils estoient plusieurs prevosts avec quelques autres gens15, et avec quatre couleuvrines ils se mettent à les battre ; la batterie dure tout un jour, et ceux qui estoient dedans, environ trois cens, se mettent en devoir de se defendre ; mais à la fin Guillery, voyant qu’il ne pouvoit tenir long-temps, sort de furie avec ses gens à la desesperade, et, fendant la presse, bien monté et armé de toutes pièces, passe outre avec quelques uns de ses gens qui estoient les plus legerement et mieux montez16 ; et le reste, étant chargé de près par soldats fort adroits aux armes, conduicts par bons capitaines qui n’ignoroient pas toutes les ruses et stratagèmes dont il falloit user pour avoir tels voleurs, car en fin finale, ils furent prins avec le capitaine Guillery17, qui fut accablé soubs la foule qui les arresta, et tandis les autres passent outre à tirer vers la mer, où ils trouvent une navire sur le bord, où ils ravagent et tuent la plus part de ceux qui estoient dedans, puis ils se mettent sur la mer où ils se sont encore mis à escumer et ont faict plusieurs voleries.
Estant donc le capitaine Guillery demeuré pris avec environ quatre vingt de ses gens, il est mené à Saintes, où son procez luy fut faict dès le lendemain, et luy condamné à la rouë avec tous ses complices, qui furent rouez en plusieurs lieux, pour donner exemple ; mais lui fut executé à la Rochelle, où étant sur l’eschaffaut, d’un visage rassis et d’une contenance qui marquoit bien son assurance, sans aucun effroy, il arrache ces pitoyables paroles du milieu de ses remors qu’il pousse dehors, en presence de toute l’assistance, qui estoit composée d’une infinité de personnes qui accouroient de toutes parts à ce spectacle.
« Je pense qu’il n’y a personne de vous autres, Messieurs, qui ne soit icy pour contenter ses desirs en la peine qu’on dedie à mon supplice ; mais quand on aura mis en la balance tout le faict de mon destin, vous donnerez plus tost des larmes à ma fortune, que vos desirs à l’accomplissement de ceste miserable prophetie de ma defaite. Il est vray, cest eschaffaut odieux, et que mes mesfaits ont estez les degrez par lesquels je me suis porté ; mais quoy ! ç’a esté un coup à qui je ne pouvois gauchir, et un passage qu’il me failloit traverser. Il y a ici beaucoup de gens qui sçavent la maison d’où je suis sorti, laquelle doit à ce jour avoir une si ignominieuse tache être attachée à la memoire de posterité qui ternira son renom au souvenir de la faute. » Et disant ces mots, les larmes luy commencèrent à couler le long des joües ; puis, se tournant de l’autre costé :
« Et combien, Messieurs, il n’est pas incompatible qu’il ne puisse sortir un mauvais fruict d’une bonne semence, selon le champ où sera semé, qui le corrompt quelquefois, ou la constellation des astres, qui luy sera contraire ; de façon que, quand vous blasmerez ma fortune et celle de mes compaignons, je vous prie, et mes larmes vous y convient, de jeter les yeux de vostre memoire sur mes ayeuls, qui n’ont jamais veu courir des ombrages si odieux que cela sur leur reputation, et dont les vertus ne me doivent presager que de merveille ; mais quoi ! les meilleurs naturels peuvent être corrompus comme le mien, qui, se laissant flatter aux persuasions de mon frère, que le desespoir avoit envelopé en ses toilles, s’est laissé emporter à ses desbauches, qui me font aujourd’huy dresser les cheveux à la contemplation de ma faute, et, d’une main odieuse, me presentant ceste coupe funeste qu’il faut que j’avalle quand le malheur me range à ses loix. J’ai jetté incontinent les yeux sur ce que le presage de ma fortune me presentoit tout au long ; mais ma fragilité, qui ne faisoit en sorte de penetrer si avant, m’a toujours empêché de voir la fin ; je me suis trouvé sur le dernier saut de ma defaicte, où il faut que la peine que l’on prepare à mon corps satisface pour les forfaicts que j’ai commis. » Il faict une petite pose, puis, tirant un grand soupir, il dit encore :
« Je vous puis bien asseurer que la mort qu’il me faut endurer tout maintenant ne me fasche point, puisqu’il nous faut tous passer ce passage ; mais il n’y a que le chemin par où il faut que je le franchisse qui me soit fascheux, avec le blasme qui en doit courir sur mes parens, et les presages qui menacent encore mes frères de frapper au mesme caillou. Je prie Dieu qu’il leur ouvre les yeux pour les appeller à penitence et leur faire changer le train de leur vie, afin que, se retirant, ils puissent atteindre à une fin heureuse. Et vous autres, Messieurs, consolez mes parens, leur remonstrant que, si à ce aujourd’huy la fortune fait courir ce nauffrage sur leur memoire, ils en doivent combattre la douleur par la souvenance des vertus signalez de nos ayeux, et que, quand la memoire de nos desbauches leur travaillera l’esprit, ils nous restranchent du nombre de leur famille et imaginent comme si nous n’avions point esté.
» Cest oubly essuyra la playe de leur douleur, et ne laisseront pas de suivre le chemin que nos ayeux leur ont tracé. Et vous autres, Messieurs, je vous conjure d’avoir compassion de ma fortune et de prier pour mon ame, afin qu’il plaise à nostre Sauveur ne vouloir point avoir esgard à mes fautes, et que, puis qu’il me faut icy servir d’exemple, brider le courage de ceux qui se voudroient attacher aux desordres où me suis enveloppé, il luy plaise vouloir ouvrir la porte de son paradis à mon ame. »
Il se tourne vers ses compaignons, et, après les avoir encouragés de se monstrer constans à ce passage, il prie le bourreau de l’expedier le plus diligemment qu’il luy sera possible ; et, ayant recommandé son ame à Dieu, il s’estend sur l’eschaffaut, où il endura la mort d’une constance nompareille, jusqu’à ce que il rendit l’ame. Dieu veuille qu’elle soit entre ses mains ! Ainsi soit-il.
C’est verité ; j’ay desservy
Une mort encor plus cruelle ;
Car le peché que j’ay commi
Merite bien mort eternelle.
Après mal-heur (helas !) à la fin bousche
Le vil conduit d’une maligne bouche,
Et le mechant en horreur obstiné
Par un gibet est aussy ruiné.
Notes
1. – In-8 Cette pièce est l’une des plus curieuses, et pourtant des moins connues qui aient été faites sur le bandit saintongeais. Elle complète pour plusieurs détails, et rectifie, pour plusieurs autres, le petit livret qui, pendant plus de deux siècles, en popularisa l’histoire, et le même dont un érudit de Niort, M. Fillon, a donné en 1848 une édition annotée, sous ce titre, qui ne change presque rien à l’ancien : Histoire véridique des grandes et exécrables voleries et subtilitez de Guillery, depuis sa naissance jusqu’à la juste punition de ses crimes, remise de nouveau en lumière. Fontenay, imprimerie de Robuchon, 1848, in-8. À 50 exemplaires. Ce n’est, comme je l’ai dit, et comme M. Fillon le déclare lui-même, qu’une réimpression de la pièce dont je parlais, et qui, à cette même époque de 1848, avait encore à Épinal ses éditions populaires sous le titre de : Histoire de Guillery, Pellerin, in-18, 22 pages (V. Nisard, Histoire des livres populaires ou de la Littérature du colportage, in-8, t. 1, p. 534). M. Fillon n’a ajouté qu’un épisode, c’est « l’anecdote drolatique du trésorier de Saint-Michel-en-l’Herme, que la tradition, dit-il, a pris soin de conserver. » Il s’est aussi servi, dit-il encore, de la relation donnée par Fr. Rosset dans ses Histoires tragiques ; mais c’était sans doute pour n’en rien tirer de nouveau, car nous avons lu ce récit, qui est la XIXe histoire du livre de Rosset dans l’édition de Lyon, 1701, in-8º, p. 349, etc., et nous n’y avons trouvé que la reproduction, mot pour mot, du livret populaire. Collin de Plancy, dans ses Anecdotes du XIXe siècle, Paris, 1821, in-8º, t. II, p. 267, avoit déjà donné un long extrait de ce chapitre des Histoires tragiques, et l’auteur d’un article du Mercure de France traitant du même sujet, reproduit par Merle dans l’Esprit du Mercure, etc., Paris, 1808, in-8, t. I, p. 27–29, l’avait aussi suivi de tout point. Quant à la pièce que nous donnons, et qui, je le répète, est si bonne à lire après l’autre, personne n’en a dit un mot. L’auteur de l’article Guilleri, dans la Biographie universelle, et après lui M. Fillon, la citent seulement, avec ce titre inexact : Prise et lamentation du capitaine Guilleri, in-8.
2. – quelqu’un – Le nom véritable du chef de bande ne se trouve pas davantage dans le livret réimprimé par M. Fillon ; seulement une note curieuse de cet érudit nous donne la raison du sobriquet qu’il prit. Dans les légendes poitevines, saintongeaises et vendéennes, il existait, bien avant le temps de Guillery, un type de chasseur ou de brigand nocturne connu sous le nom, presque semblable, de Guallery. On appeloit Chasse Guallery ses courses dans les bois, après lesquelles on trouvoit toujours quelque cadavre au fond des taillis. Plusieurs ballades furent faites sur Guallery et sa chasse. M. Fillon (p. 27–30) en cite une qu’il entendit chanter à Saint-Cyr en Talmondois, et dans laquelle Guallery, déjà moins redouté, est mis en scène, non pas tant comme un chasseur d’hommes que comme un dépisteur habile de lièvres et de perdrix. Son nom, toutefois, au commencement du dix-septième siècle, devait avoir encore gardé tout son sinistre caractère, et il n’est pas étonnant que le noble Breton, se faisant bandit, voulût en prendre un qui le rappelât, et se donnât celui de Guilleri. Il en résulta entre les deux personnages une confusion inévitable, et dans laquelle on est surtout tombé au sujet de la chanson si populaire encore, surtout en Saintonge, avec ce refrain : Toto carabo, compère Guilleri. On pense qu’il s’agit de Guilleri le brigand ; mais M. Fillon prouve fort bien qu’il doit être question de Guallery le chasseur fantastique, puisque trente ans avant l’arrivée du bandit dans le Bas-Poitou, on avait imprimé une plaquette anonyme intitulée : Le vray pourtraict du Huguenot, MDLXXIX, petit in-8, 12 pages, ou se trouve, page 7, cette allusion à l’un des épisodes de la chanson : « Comme Guallery, ils se casseront la jambe, si mieux n’aiment le col. »
3. – duc de Mercure – Le duc de Mercœur, qui commandait en Bretagne, et le dernier qui tint pour la Ligue. « En ce temps-là, lit-on dans le livret publié par M. Fillon (p. 7), le duc de Mercœur tenoit encore la Bretagne, et avoit amassé autour de lui force gens de toute sorte. Guillery s’alla enrôler sous ses étendards, où il ne fut pas long-temps sans conquérir réputation. »
4. – Scyni – Scinis, le brigand tué par Thésée.
5. – quatre cens hommes – Dans l’Histoire de la vie et grandes volleries, etc., il n’est parlé d’abord que « d’une quarantaine des plus résolus mauvais garçons », dont Guilleri se fait le chef.
6. – bois – Il avait trois ou quatre retraites en Bas-Poitou, Bretagne et Saintonge, les plus sûres dans les forêts de Machecoul, des Essarts, de la Chastenerie. Id., p. 8.
7. – Nantes – Dans le livret populaire, cette aventure forme le chapitre 3e, qui a pour titre : « Comme il vola un paysan en lui faisant prier Dieu. » Le récit est le même à peu près ; seulement la scène ne se passe pas sur la grande route de Nantes, mais sur « le grand chemin qui va de Nantes à La Rochelle ». Le bonhomme se rendait à cette dernière ville.
8. – S.Hermine – Le château de Saint-Hermine étoit la baronie de Jacques Desnouches, chevalier, seigneur de la Tabarière, baron de Saint-Hermine, mari de Anne de Mornay, fille de l’illustre Duplessis Mornay. Fillon, notes.
9. – Mareul – L’affaire du château de Mareuil est racontée, p. 12–13, dans le livret publié par M. Fillon.
10. Bessay, selon M. Fillon, appartenait alors à Jonas de Bessay, chevalier, baron de Saint-Hilaire, seigneur de la Voute de Boisse, gouverneur de Talmond, mari de Louise Chasteigner, fille du seigneur de Saint-Georges.
11. – forteresse – C’était celle du bois des Essarts.
12. – long de la mer – Dans l’Histoire de la vie et grandes voleries, etc., il est parlé de ce luxe de Guilleri et de ce « cuir d’Espagne volé sur mer, près des Sables-d’Olonne, à la prise d’un vaisseau enlevé par ses gens, qui exerçaient aussi la piraterie, et avoient alliance avec les forbans de plusieurs pays. » Fillon, p. 13.
13. – mains – Guilleri fit souvent de ces mauvais partis aux prévôts. Il y a deux chapitres à ce sujet dans l’Histoire de la vie et grandes voleries… : savoir : Comme Guilleri prit prisonniers les prévosts de Niort et de La Rochelle. — Comme Guillery rencontra le prévost de Fontenay avec ses archers.
14.- Orléans – Nous n’avons trouvé qu’ici ces détails sur les excursions lointaines de Guilleri et de sa bande. Il est certain qu’ils furent alors redoutables par toute la France, et qu’on les trouve nommés avec les Rouget, Barbet, Grisons, et autres bandits qui désoloient le royaume sur ses points les plus opposés.
15. – autres gens – M. de Parabère, gouverneur de Niort, commandait l’attaque, qui est ici racontée avec plus de détails que dans le livret de M. Fillon.
16. – montez – «… Guilleri, ne craignant ni Dieu ni diable, ayant exhorté ses gens à la défense, sortit le premier, monté sur un cheval, le pistolet en main, passa au travers les ennemis et se sauva. »
17. – Guillery – C’est le frère du grand Guillery, dont il est parlé au commencement de cette pièce. Quant à lui, il s’est sauvé, comme nous venons de le voir ; d’après l’Histoire de la vie et grandes voleries…, il s’en va dans les environs de Bordeaux, y vit quatre années environ en riche gentilhomme, puis, découvert par un marchand qu’il avait autrefois volé, il est pris et rompu sur la place publique de La Rochelle (ou Saintes).
Sources : Variétés historiques et littéraires