COMPTER LE TEMPS

Compter le temps






Dès la plus haute antiquité, l’homme a senti le besoin de mesurer le temps. L’histoire de la mesure du temps remonte aux premières civilisations (Égypte, Chine). La mesure du temps a rapidement été une préoccupation importante, notamment pour organiser la vie sociale, religieuse et économique des sociétés. Les phénomènes périodiques du milieu où l’Homme vivait – comme le déplacement quotidien de l’ombre, le retour des saisons ou le cycle lunaire – ont servi de premières références.

 

Montre en forme de bouton de pavot, début du XVIIe siècle

 

Mais progressivement, l’Homme s’est inspiré de phénomènes physiques, dont il avait remarqué le caractère périodique, pour concevoir et mettre au point des dispositifs de mesure du temps de plus en plus précis, ainsi que des unités adaptées. L’application du balancier aux horloges mécaniques en est un exemple ; ces appareils permirent aux hommes de connaître l’heure à tout moment et en tout lieu.

Les horloges les plus simples connues sous l’Antiquité sont le cadran solaire (systèmes simples qui, pour fonctionner, ont besoin du soleil et de la lumière du jour). A cette époque, un autre moyen simple comme l’horloge à eau ( clepsydre ), mise à jour également en Egypte sous Aménophis 1er, servait à mesurer le temps.

La supériorité des clepsydres était de donner l’heure la nuit. Les clepsydres ont été remplacées par les sabliers dont la précision était plus fiable. Se sont succédés ensuite différents procédés, basés surtout sur la combustion : mèches à nœuds équidistants, lampes à huile dans des récipients gradués, bougies à taquets ou de petits poids sont incorporés de façon à tomber toutes les heures. Mais la précision de ces instruments restait très médiocre, jusqu’à un écart d’une heure par jour.

Il a fallu attendre l’année 725 de notre ère, pour voir apparaître le premier mécanisme à échappement, semble t-il inventé par le Chinois I Hing. L’échappement est une partie primordiale d’une horloge.

Dès le XIIe siècle, le contrepoids devient moteur à la cour de France, puis avec l’horloge à mercure d’Alphonse le Sage et la clepsydre de Drover (1270) ; les systèmes de régulation sont avant tout des ralentisseurs de la chute du poids moteur, d’abord sous forme de flotteur d’un vase horaire, puis de tambour hydraulique compartimenté.

L’évolution de l’horloge se fit au même moment que celle du commerce. C’est au XIIIe siècle, que les premières horloges à poids ( horloges de clocher ou d’ édifices publiques ) apparaissent. Une amélioration rapide de la technique et de l’esthétique a permis de donner naissance à l’horloge dite de maison, mais celle-ci reste encore très peu précise.

Les mécanismes, fabriqués jusqu’alors en fer, rouillent et, de ce fait, sont vite remplacés par des mouvements en cuivre.

1283 voit la naissance en Europe des premières horloges mécaniques : Londres, Dunstable Priory, Bedfordshire.

Dès le XIVe siècles, les horloges mécaniques se multiplient. Les horloges à échappement sont implicitement évoquées en 1300 dans les Comptes du Roi de France (Pipelard), le Roman de la Rose de Jean de Meung (vers 1305), la Divine Comédie (1314-18) de Dante, puis de façon explicite par Froissart (li Orologe amoureus)(1360). A Milan, l’horloge de St-Gothard est admirée de tous (1335). Jacopo Dondi construit une horloge pour Padoue (1344). En 1350-1380, création de la première horloge à alarme à Würzburg. En 1364, Giovanni Dondi, le fils de Jacopo, termine l’horloge de Pavie  » en laiton et en cuivre « .L’horloge de la Cathédrale de Salisbury construite en 1386 (découverte 1929 et restaurée) est la plus ancienne en fonctionnement. Pour rendre les horloges mobiles, le rôle des poids moteurs est assuré par un ressort. L’irrégularité de la force restituée nécessite un système de compensation.

La plus ancienne horloge astronomique conservée est celle de la cathédrale de Bourges date de 1424. Pour la petite histoire, il faut savoir qu’un mulet portant une horloge accompagne Louis XI en voyage.Mais aussi que Ludovic Sforza, en 1488, aurait remplacé un bouton de costume par une petite horloge ou  » montre « . En 1500 l’évêque de Cologne possède une canne avec une montre dans son pommeau ; en 1518, le roi de France a deux dagues (sorte de poignard très à la mode à cette époque), dans le pommeau desquelles Julien Coudray avait logé un mouvement de montre de un pouce de diamètre.

Dès dette époque, le ressort moteur, enroulé dans une boîte ou barillet, tire, en se désarmant, la corde à boyau enroulée préalablement sur la fusée (tronc de cône). Un dispositif égalisateur de force, associé à un ressort spiral libre, apparaît en Allemagne (Stackfreed), réduisant l’encombrement de la partie motrice. Il s’effacera devant la fusée, de meilleur rendement.

Vers 1550 les vis commencent à remplacer les clavettes. L’échappement à verge , dit à roue de rencontre, comprend un foliot droit, remplacé par un balancier.

Il faut attendre 1650 pour que Pierre Fardoil, à Blois, construise des mouvements de moins d’un demi pouce de diamètre pouvant être logé dans le chaton d’une bague. Celui qui est conservé au Louvre a 15 mm de diamètre. Celui de la collection du Dr E.Gschwind, qui est aujourd’hui à Bâle, est signé J.Poette A Blois, est parfaitement constitué et est en état de marche, il date de 1660. Ce sont les deux seules montres miniature de cette époque qui ont survécu ainsi équipées. Dans les montres et horloges d’appartement, le laiton tend à remplacer le fer qui continuera à être employé jusqu’au XIXe siècle, surtout dans les horloges rustiques ou de clocher.

Les principales régions de fabrication en France sont, au XVIe siècle, Blois, Lyon, Toulouse, Paris, Rouen et Abbeville. Les horlogers n’ont pas été groupés en corporations aussi anciennement que les apothicaires ou même que les orfèvres. C’est à Paris que François 1er réglemente en 1544, la profession d’horloger. L’horloger du XVIe siècle, se doit d’exercer son apprentissage pendant sept ans, et ceci de façon très stricte. Les statuts de 1583 et de 1646 fixaient la durée de l’apprentissage du compagnon horloger à huit ans chez un maître horloger, puis il perfectionne ses connaissances comme compagnon chez d’autres maîtres, ensuite de quoi, pour passer maître, fabriquer sous les yeux d’un des gardes-visiteurs, le chef-d’œuvre imposé, généralement une « horloge à réveil-matin ». Chaque corporation d’horloger avait un poinçon bien défini dont la contrefaçon pouvait valoir à ses auteurs d’ « être pendus et étranglés ». (Déclaration royale du 4 janvier 1724.) Cette sévérité a permis à notre horlogerie de se développer pendant deux siècles et d’atteindre un très haut niveau de qualité.

Poursuivant les travaux de Galilée, le mathématicien hollandais Christian Huygens (1629-1695) applique aux horloges, en 1657, un pendule chargé de régulariser leur marche. Il charge Salomon Coster de construire la première horloge de ce type qui, bientôt, portera le nom de pendule. Gruel remplace en 1664 dans les montres, la corde à boyau par une chaînette, plus sûre. En 1675 Huygens fait exécuter par Isaac Thuret la première montre à ressort spiral réglant (progrès décisif vers la précision, invention contestée notamment par Hooke). Vers la fin du XVIIe siècle, L’Anglais Daniel Quare (1649-1724) adapte l’aiguille des minutes au centre de la montre. Vers 1700 en Angleterre, utilisation de pierres percées comme coussinet de pivotement, pour les balanciers d’abord.

Le XVIIIe siècle voit de nombreuses évolutions dans l’horlogerie. En 1714 avec d’autres États, le Parlement anglais met au concours  » toute méthode capable de déterminer la longitude en mer  » avec une prime de 10 000 livres pour un résultat n’excédant pas 1 degré d’erreur, 15 000 livres pour 40 min et 20 000 livres pour 1/2 degré et moins. L’Angleterre était atterrée par les désastres dus à des erreurs de longitude [exemple : perte de l’escadre de sir Cloudesley Shovel (1650-1707) qui se jeta sur les îles Scilly (ou Sorlingues) alors qu’il croyait entrer dans la Manche (1707). L’Anglais George Graham (1673-1751) améliore en 1718 l’échappement en « auge de cochon » (échappement à cylindre), inventé par Thomas Tompion (1639-1713), Booth (Edward Barlow dit , 1639-1719) et Houghton. John Harrisson, Anglais (1693-1776) invente le pendule compensateur en 1725, composé de deux métaux différents par leur coefficient de dilatation ; appelé gridiron, ce pendule rend l’horloge insensible aux changements de température. En 1748 et 1754 le Français Pierre Le Roy (1717-1785) applique, le premier, l’échappement à détente. 1751 voit John Harrisson obtenir la première partie de la prime offerte par le Parlement anglais, après son quatrième chronomètre, et en 1773 la deuxième moitié après son cinquième. Vers 1760 le Britannique James Cox invente une horloge apparemment dotée du mouvement perpétuel : il utilisa en fait l’énergie produite par les variations de la pression atmosphérique (une colonne de mercure monte et descend suivant les variations de la pression atmosphérique, poussant un levier qui remonte les poids du mécanisme du balancier). Le Français d’origine suisse, Ferdinand Berthoud ( 1727-1807), mécanicien de la Marine, construit des montres marines en 1767-69. Pierre Le Roy obtient les deux prix successivement offerts par l’Académie des sciences pour  » la meilleure manière de mesurer le temps en mer « . En 1771 Louis Abraham Breguet, Français d’origine suisse ( 1747-1823) invente un système de remontoir et de mise à l’heure  » au pendant « . Plusieurs horlogers prendront des brevets à ce sujet au XIXe siècle, mais ce système ne s’imposera qu’à la fin du siècle (la fabrication des montres à clef s’arrêtera vers 1890-1900). Vers 1770-80 le remontage automatique attribué au Suisse Perrelet (1729-1826), perfectionné par Breguet. La montre automatique d’après de très sérieuses recherches historiques réalisées par Joseph Flores, serait de Hubert Sarton. Sous Louis XVI, aucune technique nouvelle n’est mise au point. Seuls les modèles évoluent (pendules en forme de lyre, de vases, de portiques à colonnes ). Les matériaux utilisés sont le marbre, la porcelaine, le bronze, etc … la collaboration entre les différents compagnons est remarquable. Elle permet à notre horlogerie d’être renommée à travers toute l’Europe.

L’apogée de l’horlogerie en France, se termine en 1789 par l’abolition de la corporation.

1790 à Genève organisation du premier concours de précision entre chronomètres. Leur degré de perfection est apprécié par un système de points définitivement fixé en 1879 par Émile Plantamour (Suisse, 1815-82), directeur de l’Observatoire de Genève [autres concours : Kew et Teddington (G.-B.), 1884 ; Besançon (France), 1885].

Le 5 octobre 1793, la Convention décrète la décimalisation du temps et le 7 avril 1795, un décret suspend son application pour une durée indéterminée.

Avec le XIXe siècle apparaît avec l’avènement de l’électricité, la première horloge éclairée en 1826 (église St Bride, Fleet Street, Londres) et la première horloge électrique d’Alexander Bain en 1840 (Angl., 1811-77). L’année 1868 voit la création de la  » montre à 20 F « , de Georges-Frédéric Roskopf (Suisse, 1813-89), 1re montre fiable d’usage courant. Le 1er janvier 1873, le Japon abandonne les heures temporaires et adopte le système européen des heures équinoxiales ; début de l’industrie horlogère japonaise. En 1876, un allemand installé en suisse, Paillard invente la première montre anti-magnétique et en 1896, la marine allemande adopte, pour ses officiers, des montres retenues au poignet par une chaînette.

Avec le XXe siècle, la vulgarisation se poursuit.

1901, apparition de la montre de poche la plus plate du monde : 2 mm d’épaisseur, mouvement 1,18 mm [les plus plats, produits en série (1,64 mm), peuvent être logés dans une pièce de monnaie], vers 1910 on porte au poignet les premières montres de sautoir, dans un bracelet adapté ; des anses de fil ayant été ajoutées, la montre est directement maintenue par un bracelet du type courroie et en 1917 début du cadran lumineux (radiolite supplantant peintures au phosphore). Jean-Léon Reutter mets en 1926 au point la pendule Atmos , à balancier atmosphérique, prévue pour marcher 600 ans sans intervention humaine ; se remonte grâce à un mélange gazeux (chlorure d’éthyle) contenu dans une capsule qui se rétracte et se dilate à chaque variation de température [une variation d’un degré assure une autonomie de 48 h (1 journée d’une saison normale donne 1’année de réserve), n’oscille que 2 fois par minute (au lieu de 300 fois pour une montre-bracelet classique).

Les inventions se poursuivent rapidement :

  • 1928, remontage automatique sur montre-bracelet ;
  • 1933, la première horloge à quartz oscillant (16 384 alternances par seconde) ;
  • 1949, la première horloge moléculaire à ammoniac ;
  • 1952, la montre électrique ;
  • 1954, la première horloge atomique ;
  • 1959, montre électronique ;
  • vers 1968, la montre à quartz analogique ;
  • 1970, la montre à quartz numérique, à diodes luminescentes, puis à cristaux liquides ;
  • 1975, la montre calculatrice ;
  • 1979, la montre-réveil multi-programmable ;
  • 1984, la montre-ordinateur, la montre à affichage analogique devance celle à affichage numérique en Occident ;
  • 1988, l’ horloge commerciale radioélectrique ;
  • 1990, la montre-bracelet radioélectrique, montre radio-pilotée Junghans (Sté allemande créée 1861), munie d’une antenne qui reçoit de l’émetteur (portée 1 500 km) les informations sur grandes ondes venant de l’horloge atomique mère. Un microprocesseur compare ces messages avec sa propre horloge interne à quartz et se réajuste automatiquement en cas de différence ;
  • 1991, la montre-bracelet parlante ;
  • 1992, la montre radio-pilotée solaire ;
  • 1993, la montre à télécommande ; montre recevant des messages ;
  • 1994, le cadran lumineux revêtu de sulfate de zinc et de cuivre excité par un champ électrique procurant une lumière bleue (Timex) ;
  • 1996, la montre à quartz sans pile : un rotor actionne un générateur de courant stocké dans un condensateur (Seiko) ;
  • 1997, la montre embryonnique Biowatch qui s’auto-répare et s’auto-reproduit (Daniel Marge, Lausanne)

.Mais dans nos campagnes, ce qui nous était plus familier, hormis les montre et l’horloge du clocher, c’était l’horloge comtoise.

 

L’horloge comtoise

 

À l’origine, les Comtoises ont conquis les foyers des diverses provinces françaises, souvent offertes comme cadeau de mariage… En effet, elles constituaient un cadeau de grande qualité : utiles, très solides dans le temps, d’un prix relativement accessible, elles se sont vite avérées être précises et fiables. La sonnerie des heures s’entendait dans toute la maison et rythmait ainsi le quotidien d’une famille du lever au coucher de soleil. La présence chaleureuse des Comtoises dans les foyers est due à leur tic-tac régulier et à la forme du meuble imposant qui l’abrite. Ce sont des horloges très populaires, pendant des générations, elles ont rythmé le temps dans presque toutes les fermes de France. De nombreuses Comtoises ont également été exportées vers d’autres pays d’Europe et même plus loin, jusque dans l’Empire ottoman ou en Thaïlande.

 

 

Les Comtoises se caractérisent par la présence de deux mécanismes, le premier pour le mouvement et le second pour la sonnerie. Ces mécanismes sont situés côte à côte dans une cage en fer démontable. L’entraînement est effectué par deux poids en fonte, la régulation est assurée par un long balancier (ou pendule). Un mouvement d’horloge tel que celui-ci, normalement entretenu, est capable de fonctionner pendant des siècles. Le mécanisme en métal est souvent protégé par une gaine en bois. Malheureusement, il n’en est pas de même pour les boîtiers en sapin qui ont protégé au mieux l’élément vital de l’horloge au détriment de leur propre survie. La fabrication de la caisse était réalisée à la ferme, surtout l’hiver, lorsque la neige recouvrait la terre. La plupart des comtoises ont vécu une existence rustique, dans la cuisine, sur la terre battue, à l’épreuve du quotidien ( fumée, graisse, poussière, humidité…), et ce, pendant des générations. Dans ces conditions, on comprend une certaine lassitude. Un tel achat, enlaidi par le temps, n’incitait pas, un siècle plus tard, à son renouvellement, d’autant que d’autres productions gagnaient du terrain.

Déjà en 1900, plusieurs millions de comtoises ont trouvé acquéreur. Le sommet de la production se situe dans la seconde moitié du XIXe siècle ;1915 correspond à la fin de la production industrielle des horloges comtoises. Il reste en 2018, peu de fabricants en France d’horloges comtoises.

Au milieu du 17ème siècle, l’horloge du clocher des capucins de Saint Claude tombe en panne. Le bedeau ne sait plus quand il doit faire sonner la messe. Ignace Mayet qui travaille avec son frère à Morbier dans une forge et qui a la réputation d’être un habile artisan, refuse de réparer l’horloge qui est bien trop usée et inexacte. Il préfère concevoir et fabriquer  lui même axes, roues et leviers et assemble une horloge neuve. Cette horloge marche bien. Encouragé par ce succès il commence, avec son frère, à créer d’autres horloges pour des bâtiments officiels. Mais l’idée de fabriquer des horloges pour maisons n’est réalisable qu’après l’invention par le hollandais Huygens de son pendule régulateur. Cette technique nouvelle atteint le Haut-Jura entre 1670 et 1680. La famille horlogère Mayet utilise alors aussi cette invention, la « Comtoise » est née.

Connues sous plusieurs appellations (Morez, Morbier ou Comtoises), les horloges présentent un aspect extérieur souvent différent. En effet, la décoration des horloges varie suivant la période et ses sources d’inspiration s’appuient sur l’actualité politique française (les Bourbon, la révolution française …) ou sur des sujets plus neutres. .

Mais qu’est ce qui les rend aussi remarquables ? Ce n’est certainement pas la technologie utilisée, en effet les artisans anglais ou hollandais fabriquaient des mécanismes plus complexes et plus précis que les premiers « Paysans-Horlogers » de Franche-Comté. Les produits des Maîtres horlogers de Paris ou les pendules neuchâteloises étaient plus richement décorés et plus raffinés.

La « Morez » correspond à un véritable art populaire, puisqu’elle est fabriquée par des gens simples de la campagne, par opposition aux autres horloges produites dans les villes par une élite et par des artisans spécialisés.

La vie dans le Jura est difficile. Les hivers qui durent de cinq à sept mois retiennent les habitants dans les maisons. Les femmes filent la laine ou le lin et cousent les vêtements pour toute la maisonnée. Elles gagnent également un peu d’argent avec des broderies en coton ou en soie. Les hommes s’occupent du bétail et travaillent dans la forêt. Habiles dans le travail du bois, ils réalisent toutes sortes d’objets pour la vie de tous les jours : bacs, gobelets, écuelles, plats, jattes, cuillers …

Le bois présent de façon abondante est aussi utilisé pour produire du charbon de bois. Celui-ci est utilisé localement dans des forges pour fabriquer différents outils en acier. La connaissance du travail du métal va permettre de réaliser les premières horloges.

Les paysans-horlogers connaissent les techniques des forgerons, des tourneurs, ils savent tailler des engrenages, monter et polir les horloges. Dans les fermes, les établis prennent la meilleure place… à proximité de la fenêtre. Le partage du travail dans une même famille se spécialise. Un membre de la famille termine les roues et les engrenages, un autre place les roues et les axes et le « Rhabilleur » termine le montage.

On estime qu’entre 1680 et 1800 la production d’horloges fabriquées dans les fermes s’élève à plusieurs dizaines de milliers (moins de 100.000 toutefois). Après 1850 une large couche de la population peut s’offrir de telles horloges, la demande augmente.

Avec 18 sociétés horlogères dont les activités vont du travail du métal  à la  fonderie de cloches ou aux ateliers d’émail la production atteint 60.000 horloges et de nombreux cadrans par an. La production artisanale dans les fermes est remplacée par une organisation industrielle. Les horlogers qualifiés n’interviennent plus que pour la mise en place du cadran et des aiguilles mais aussi pour le réglage des horloges. La plupart des pièces est alors réalisée par des ouvriers spécialisés travaillant dans des ateliers, où des machines mues par la force de la rivière sont à leur disposition.

On suppose que les premières « Morez » sont vendues de maison en maison par des marchands ambulants. Les acheteurs doivent ensuite se procurer des poids auprès du forgeron le plus proche, en effet, les poids sont trop lourds pour être également transportés. Ces premières horloges sont posées sur des consoles murales ou accrochées au mur

Le mobilier du premier quart du XVIIIe siècle devient plus riche. C’est alors qu’apparaissent les caisses en bois qui abritent les horloges, le balancier et les poids. A la demande des revendeurs ou des clients les menuisiers fabriquent des boites à horloge. Les bois utilisés sont le chêne, le noyer, le merisier ou le châtaigner. Les premiers bâtis sont tout droits, carrés, sans décoration. Les bâtis suivants sont décorés avec des sculptures et en partie bombés. Ils peuvent atteindre une hauteur de 2m50 ou 3 mètres. La forme et le style varient suivant l’époque et la région mais s’adaptent aussi aux meubles existant. Les caisses et les horloges ne sont pas toujours de la même époque. Un mécanisme en panne peut être remplacé, mais en gardant le même bâti d’horloge.

Les bâtis des horloges de la première et de la deuxième générations dissimulent le balancier (voir photo de gauche), alors que ceux de la troisième génération comportent une ouverture arrondie pour permettre de le voir. Le balancier de la quatrième génération est richement décoré et mis en valeur par une porte vitrée.

Une unité de forme apparaît seulement avec la fabrication des caisses en série (en bois d’épicéa). Vers 1860 les premiers ateliers de menuiserie spécialisés sont créés à Morez (mais aussi à Bois-d’Amont). Leur production est décorée de peintures paysannes par des travailleurs à domicile.

Emile Rosset, éditeur de « l’Almanach du vieux Savoyard » s’offusque de la description d’un atelier familial : « Ici se trouvent des gaines de comtoises dans tous les stades de leur fabrication. Elles ont plusieurs formes : étroites, ventrues ou resserrées, certaines sont encore blanches, les autres sont déjà peintes. Dans cette pièce, où l’on cuit la nourriture et où l’on réchauffe le verni, règne une odeur très particulière, mélange de soupe aux choux et de térébenthine. Sur une table une gaine attend sa décoration ».

L’âge d’or des horloges de type « Morez » se situe entre 1860 et 1880, à l’époque environ 80.000 unités sont produites chaque année. En 1900 la production n’est plus que de 35.000 unités.

Une forte concurrence et un changement de goût des acheteurs (qui veulent des horloges plus petites) conduisent à l’arrêt de la production au début de la première guerre mondiale

 

Vente à l’essai :

 

Les colporteurs, chargés de revendre les horloges dans toutes les régions de France inventent la vente à l’essai. Lors d’un premier passage dans les maisons, ils proposent aux clients intéressés de garder l’horloge jusqu’à leur retour. Entre temps chacun se familiarise avec le tic-tac rassurant et l’horloge reste à demeure.

 

 Une des premières horloges comtoises vers 1700

 

Pendant près de 230 années, l’horloge comtoise va évoluer et se diversifier.

 

Quatre générations d’horloges vont se succéder :

 

  • La première génération :

    • De 1680 à 1770 : cadran en laiton ou en étain

    • De 1720 à 1785 : cadran à cartouches en émail

  • La deuxième génération : De 1750 à 1830 : cadrans en émail et fronton en laiton coulé

  • La troisième génération : De 1815 à 1840 : couronnement en 2 pièces estampées

  • La quatrième génération : De 1840 à 1913 : couronnement en une seule pièce estampée

  • La « Lunette » De 1870 à 1913

On constate que les comtoises sont des horloges « Politiques », dit Siegfried Bergmann collectionneur d’horloges (de Hemhofen en Allemagne). « Aucune autre horloge n’a vue son apparence autant influencée par les événements politiques ».

  • La Révolution française :

    En effet, la situation politique de la fin du 18ème siècle et du début du 19ème siècle s’exprime dans les décorations du fronton. Pendant la Révolution française (1789) le coq ou Phoebus (le soleil) est soutenu par un couple d’oiseaux. Au centre du fronton, en médaillon, une poignée de mains, un bonnet phrygien ou l’inscription « Liberté ». A cette époque, les emblèmes de la monarchie (fleur de lis) sont souvent limés, en effet, les esprits évoluent et personne n’est à l’abri d’une dénonciation.

  • Le Directoire :

    Pendant le Directoire (de 1795 à 1799) les symboles de la révolution disparaissent. Le médaillon comporte une étoile à cinq branches (voir image de droite), le médaillon peut également être vide et poli. Les deux oiseaux sont parfois remplacés par deux anges.

  • Le Consulat :

    Pendant la période du Consulat (de 1799 à 1804), l’aigle impérial remplace le coq. Le médaillon est neutre ou  comporte une représentation de Bonaparte en premier consul .

  •  L’Empire :

    Pendant l’Empire (de 1804 à 1815), alors que Napoléon s’est lui même couronné empereur, l’aigle porte une couronne.

  • La Restauration :

    La période suivante : la Restauration (de 1815 à 1830) est une période de transition. Les Bourbons espèrent un retour au pouvoir grâce à la grande bourgeoisie. Mais d’un autre coté le peuple s’accroche aux droits acquis lors de la révolution. Sur les frontons, on retrouve alors l’aigle ou le coq, ainsi que la poignée de mains ou le soleil (Phoebus) et trois petites fleurs de lis. Au début du règne de Louis-Philippe, période enfin plus calme, on produit déjà les horloges de la troisième génération qui apporte avec elle une série de motifs nouveaux.

Aujourd’hui, les horloges comtoises sont souvent devenues des objets de collection car elles représentent un savoir-faire de haute précision et une grande diversité. En effet, les Comtoises ont été fabriquées sur une période exceptionnellement longue : près de 230 ans

 

D’autres  » compteurs de temps «

 

En dehors des Comtoises, les plus courants sont les horloges d’édifice (clochers, mairies, châteaux, usines, écoles, chemins de fer…). La production est particulièrement importante pendant la deuxième moitié du XIXe siècle.

 

Les Jaquemarts

 

Automates  » marteleurs  » actionnés par un sonneur, puis par un mécanisme relié à une horloge, frappant une cloche. Après le XVIIIe s, : déclin du spectacle s’effaçant devant l’utilité des horloges publiques (cadran visible de loin) et pendules d’intérieur. En France on trouve environ 20 édifices de ce type. Ils représentent des personnages généralement en chêne, polychrome, parfois recouvert de fer blanc, certains en cuivre (Dijon) ou bronze (mince paroi, Cambrai), mais aussi des statuettes. Le plus grand automate est à Romans-sur-Isère (2,60 m) devançant Cambrai (2,50 m).

 

Horloges atomiques

 

A césium : reposent sur l’hypothèse que les propriétés atomiques sont immuables, notamment les fréquences des radiations correspondant aux transitions entre niveaux d’énergie.

 

 

  Sources :

– http://morez1900.net/horlogerie.htm

– http://www.horlogerie-comtoise.fr/

– « Comtoise-Uhren » de Siegfried Bergmann éd. La Pendule)

– http://perso.wanadoo.fr/bruno.jousselin

– http://www.horloges-comtoises-anciennes.fr/

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