Atelier de tournage d’une poterie

Un atelier de tourneur
Dans la fabrication des poteries, de quelque nature qu’elles soient, faïences ou porcelaines, l’opération la plus délicate et la plus importante, celle qui demande le plus grand soin et d’où dépend la réussite de toutes les autres, est l’opération du tournage. Ainsi que son nom l’indique, elle se fait au moyen d’un instrument spécial appelé tour et qui ce compose d’un plateau ou girelle, supporté par un axe vertical engagé dans une roue horizontale, pesante, que l’ouvrier, assis sur une banquette faisant partie du tour, met en mouvement avec son pied, et qui, en raison de sa masse, conserve assez longtemps le mouvement qu’elle reçoit ainsi. Quand la pièce à tourner est d’une assez grande dimension et que son poids offre une résistance trop considérable pour la seule force du pied de l’ouvrier, le tour, avec sa roue massive qui fait l’office de volant, est mis en mouvement par un autre ouvrier à l’aide d’une manivelle ou de tout autre moyen mécanique; dans les fabriques qui emploient un grand nombre de tours marchant A la fois, on leur imprime le mouvement de rotation au moyen d’un moteur commun, machine hydraulique ou machine à vapeur.
Le tournage comprend deux opérations : l’ébauchage et le tournassage ou tournage proprement dit.
Quand la pâte qui doit servir à la fabrication a été bien lavée, puis broyée et pétrie avec soin, l’ouvrier en prend une masse humide proportionnée à la pièce qu’il veut exécuter, et la pose sur la girelle; puis il met le tour en mouvement, et, à l’aide de ses mains mouillées avec de la barbotine (1), élève la masse informe, la rabaisse en une sorte de lentille, la relève encore et l’abaisse de nouveau plusieurs fois, de façon à donner à toutes les molécules qui composent la pièce, celles du haut ou du bas, aussi bien que celles de l’intérieur, une môme direction; cela est absolument, nécessaire pour éviter les fentes ou les déchirures qui ne manqueraient pas de se produire dans le mouvement de retrait pendant la cuisson, mouvement qui est en sens inverse de celui que le tour a donné à la pâte.
Le tourneur élève ensuite la pâte en la pinçant au centre entre le pouce et les autres doigts, et commence à lui donner la forme qu’elle doit définitivement avoir : pour les pièces de petite dimension, l’ébauchage se fait avec les doigts seuls; pour celui des grandes pièces, il se fait avec les mains et les poignets opposés l’un à l’autre; on se sert également d’une éponge imbibée de barbotine et qui est destinée à étendre l’action des doigts, surtout à l’extérieur.
Dans les poteries .communes et de moyenne épaisseur, l’ébauchage suffit à compléter la forme de façon qu’il n’y ait plus à y revenir : dans celles qui doivent être plus soignées, on termine l’ébauchage à l’aide d’un outil en bois nommé estèque et qui sert à amincir la pièce à l’intérieur en même temps qu’à polir la surface; enfin, lorsque la pièce doit être légère, à contours bien déterminés et à arêtes vives, on la laisse sécher après une première ébauche plus ou moins soignée, de manière à pouvoir la reprendre plus tard quand la pâte est bien raffermie, et à enlever alors au tournassage, au moyen d’une plaque d’acier à bords tranchants, droits ou courbes, faisant l’office de calibre, tout ce qui doit disparaître. Le tour dont on se sert pour cette opération est muni d’un axe horizontal à l’extrémité duquel la pièce est fixée par un emmandrinage ordinaire.
L’ouvrier tourneur peut disposer auprès de lui, posée sur le bord du tour, une tige verticale garnie de petites règles horizontales qu’il peut faire avancer plus ou moins jusqu’aux bords de la pièce à laquelle il travaille, et qui lui sert de guide pour donner à la pièce les dimensions déterminées; cet instrument a reçu, d’après sa forme, le nom pittoresque de chandelier. Il se sert également d’une lame de métal découpée qu’il approche de la pièce afin de constater qu’elle a la dimension elle profil voulus.
Toutes les poteries ne se font pas ainsi au tour; il en est qui sont moulées, et d’autres, de grandes dimensions, qui sont coulées au moyen d’air comprimé.
(1) On appelle barbotine la pâte étendue d’eau et formant ainsi une bouillie plus ou moins épaisse; en outre la barbotine sert encore à coller les anses des vases et des tasses et les ornements en relief appliqués après coup.