Le 14 juillet 1790 à Aouste sur Sye
Un « reportage » d’un citoyen sur la journée du 14 juillet 1790 à Aouste sur Sye extrait des Archives communales
La prise de la Bastille le 14 juillet 1789 est la fin de la monarchie absolue, certes. Mais pas seulement… Le 14 Juillet, c’est aussi l’anniversaire de la fête de la Fédération organisée en 1790, première commémoration de la prise de la Bastille, qui se déroula dans un climat d’union nationale. En 1790, Louis XVI et sa famille sont encore bien vivants. Nous sommes en pleine transition entre la monarchie absolue, abandonnée l’année précédente, et la République qui s’affirmera en 1792.
« … Le 14 juillet 1790, dans l’hôtel de ville du bourg d’Aouste se sont assemblés M.M. Guérimand, maire et conseillers, auxquels M. le maire a dit que par un décret de l’Assemblée Nationale tous les citoyens du Royaume étaient invités à prêter le serment civique en se présent jour et à l’heure de midi, qu’il avait publier et afficher au nom de la municipalité que tout bon patriote devait se rendre le 14, en delà du pont de la Drôme, sur les graviers de la rivière pour y prêter le dit serment.
Il eut l’honneur d’inviter Mr le capitaine commandant et officiers de la Garde Nationale à rassembler leur troupe au Champ de Mars pour se conformer au décret.
A cet effet , par ordre de la municipalité, il fut dressé sur le gravier de la Drôme, un autel dédié la Patrie; Mr le curé d’Aouste fut prié par Mr le maire d’y célébrer la messe. A l’instant ,Messieurs les officiers de la Garde Nationale se sont rendus à l’hôtel de ville pour accompagner la municipalité au Champ de Mars.
La marche a été ordonné de manière que la municipalité tiendrait la droite et Mrs les officiers militaires à gauche, dans cet ordre on s’est mis en marche; et , à quelque distance de l’hôtel de ville étaient assemblées dans un appartement 50 citoyennes décorées d’une robe blanche et d’une écharpe aux trois couleurs de la nation. Elles se sont présentées à Mrs les officiers municipaux, ont demandé leurs agréments pour se rendre avec eux au Champ de Mars et y fêter le serment civique. Mr le maire au nom de la municipalité leur a témoigné sa satisfaction et les a priées de former une troisième lige entre la municipalité et Mrs les officiers militaires; la marche a été continuée sur ces trois rangs.
Étant arrivés au lieu destiné à la prestation du serment où s’était assemblé la troupe, les tambours ont battu aux champs, le son des cloches et une décharge faite par la Garde Nationale ont annoncé cette grande fête.
La municipalité s’est rangée autour de l’autel, Mrs les officiers ont pris leur rang parmi leur troupe et les jeunes citoyennes se sont placées au centre.
Mr le curé d’Aouste est arrivé étant précédé de la confrérie des Pénitents en procession et chantant un hymne de circonstance. La messe a été célébré, pendant laquelle tous les citoyens ont gardé un respectueux silence. Cette cérémonie étant finie vers l’heure de midi, Mr le maire après avoir adressé un discours a prononcé le serment civique:
« Nous jurons de rester jamais fidèles à la nation, la loi et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir la constitution décrétée par l’Assemblée Nationale, et acceptée par le Roi, de protéger conformément aux lois la sûreté des personnes et des propriétés, la libre circulation des grains et subsistances dans ‘intérieur du royaume et la perception des contributions publiques sous quelque forme qu’elle existe et de demeurer uni tous les français par les liens indissolubles de la fraternité »
La municipalité, les officiers militaires, la troupe nationale et tous les citoyens ont répété » nous le jurons« . Au serment ont succédé les cris de « Vive la Nation, vive la loi, vive le Roi« . Le Te Deum a été chanté en action de grâce aux sons des tambours et des instruments militaires. Une décharge a été faite par les deux compagnies au commencement de l’hymne et la fin.
Le Te Deum fini , la municipalité, les officiers de la Garde Nationale, les 50 citoyennes et les deux compagnies se sont mises en marche dans le même ordre qu’ils étaient partis de la maison commune. Ayant à leur tête une musique bien ordonnée, les jeunes héroïnes ont été accompagnées à la maison où elles étaient assemblées avant le départ. Mr le maire leur a témoigné la gratitude au nom de la municipalité qui, toujours accompagné de Mrs les officiers militaires, s’est rendu l’hôtel de ville où il a distribué aux pauvres de la communauté une aumône de 2 kg de pain.
En signe de réjouissance Mrs les officiers municipaux, la Garde Nationale ont ordonné un repas civique où des toasts ont été portés à la nation et au Roi.
A 8 h du soir, la municipalité et M. M. les officiers de la Garde Nationale, accompagnés de la troupe, se sont rendus au Champ de Mars où Mr le maire avait fait construire un feu de joie; la municipalité après en avoir fait trois fois le tour, y a mis le feu et les cris réitérés de « Vive la Nation, vive le Roi » se sont faits entendre; la troupe a fait une décharge. La marche a été reprise vers l’hôtel de ville et la municipalité a témoigné sa reconnaissance à M.M. les officiers de la Garde Nationale . Cette journée à jamais mémorable a été terminée par une illumination générale… »